Touche pas à ma souveraineté !

La décision des Nations unies de constituer une commission d’enquête sur les attentats du 11 décembre 2007 n’a pas plu à Alger. Qui n’a pas manqué de le faire savoir.

Publié le 21 janvier 2008 Lecture : 2 minutes.

La décision de l’ONU, annoncée le 14 janvier à New York par le porte-parole de l’organisation, de constituer une commission d’experts internationaux extérieurs au système des Nations unies pour enquêter sur les attaques-suicides du 11 décembre à Hydra (voir J.A. n° 2449) a failli déclencher une crise diplomatique entre Alger et l’auguste maison de verre de Manhattan.
Son secrétaire général, Ban Ki-moon, a pris conscience de sa maladresse quelques heures plus tard. Le lendemain 15 janvier, en effet, il était à Madrid pour un forum sur l’Alliance des civilisations organisé par le président du gouvernement espagnol, José Luis Zapatero. Par malchance y participait également Abdelaziz Belkhadem, Premier ministre algérien. Les deux hommes se sont rencontrés en marge des travaux et l’ambiance n’était pas des plus chaleureuses.

Décision unilatérale
Au sortir de l’audience, Abdelaziz Belkhadem a saisi l’occasion pour faire savoir que son pays désapprouvait la décision de Ban Ki-moon, qu’il juge unilatérale : « La moindre des élégances était de nous en informer, et notre représentant permanent à l’ONU [Youcef Yousfi, ancien chef de la diplomatie] n’a pas été consulté. » Les Algériens, réputés chatouilleux sur tout ce qui touche à leur souveraineté, partagent la colère du chef du gouvernement. Sur un blog, un internaute rappelle au secrétaire général des Nations unies que, sur « les 17 employés de l’ONU tués par le kamikaze, 14 étaient algériens ». Et il s’interroge : « En quoi Ban Ki-moon serait-il plus attaché que nous à la manifestation de la vérité ? »
Le Coréen se défend de vouloir mettre en question la qualité de l’enquête réalisée par les services algériens : « Établir les faits concernant cette attaque doit servir à renforcer la sécurité des personnels de l’ONU dans leurs opérations à travers le monde. »
Qu’en pensent les principaux concernés, les services algériens de lutte antiterroriste ? Selon le quotidien El Watan, police et gendarmerie ne sont pas embarrassées par l’idée d’une commission d’enquête indépendante, car celle-ci ne saurait porter atteinte à la crédibilité de leurs propres investigations. Ces certitudes sont nées du fait que la décision controversée de Ban Ki-moon est consécutive à sa lecture du rapport de David Veness, son adjoint en charge des affaires de sécurité. Ce dernier avait été dépêché à Alger au lendemain des attentats-suicides. « Nous lui avions apporté aide et assistance », assure un fonctionnaire algérien qui avait accueilli le secrétaire général adjoint.
Au ministère des Affaires étrangères, on se montre moins sévère qu’Abdelaziz Belkhadem à l’égard de Ban Ki-moon. Les diplomates relèvent que la constitution d’une commission d’enquête indépendante est liée avant tout au fonctionnement interne de l’institution internationale. « Il ne s’agit en aucune manière d’une remise en cause de l’enquête criminelle menée par nos services, assure-t-on au ministère, mais de l’élaboration d’une stratégie visant à assurer une plus grande sécurité pour les fonctionnaires internationaux en poste dans des zones sensibles. »
Il est peu probable que le coup de sang d’Abdelaziz Belkhadem, rejoint par le ministre de l’Intérieur Yazid Zerhouni, ait une quelconque influence sur la coopération entre Alger et les Nations unies, mais on a certainement frôlé le pire.

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