La patte des sorciers blancs

Brésilien, Français ou Allemands… des entraîneurs venus des quatre coins du monde mettent leur talent au service des sélections africaines. Les faux pas des équipes sélectionnées pour la CAN 2008 rejailliront immanquablement sur eux. Leurs succès aussi.

Publié le 21 janvier 2008 Lecture : 5 minutes.

Berti Vogts
Un « terrier » pour coacher les Super Eagles (Nigeria)
Surnommé « der Terrier » (le fox-terrier) en raison de sa ténacité, cet ancien capitaine de l’équipe d’Allemagne affiche un palmarès éloquent. Son premier titre de gloire ? La finale de la Coupe du monde 1974 au cours de laquelle, sur la pelouse du Stade olympique de Munich, il parvint à museler le jeu du Néerlandais Johan Cruyff et contribua à la victoire. Quand il raccroche en 1979, il choisit la carrière d’entraîneur. En 1986, il devient l’adjoint de Franz Beckenbauer, qui conduit l’équipe d’Allemagne jusqu’en finale du Mondial au Mexique. Le tandem opère de nouveau, avec succès, à l’occasion du Mondial 1990. Deux ans plus tard, Vogts est seul maître à bord. Son équipe est finaliste de l’Euro 1992, gagne l’édition 1996, mais rate la campagne du Mondial 1998 en France. Berti décroche pour servir, en novembre 2000, dans le club allemand du Bayer Leverkusen. Il s’embarque ensuite pour le Koweït avant de rejoindre l’Écosse. Mais l’Allemand obtient des résultats mitigés et décide, en 2004, de mettre un terme à sa carrière. En janvier 2007, la fédération du Nigeria lui fait une offre : un contrat de quatre ans pour un salaire mensuel de 65 000 dollars entièrement financé par la firme de télécommunication Globacom. Très vite, l’ex-champion du monde découvre les réalités du football nigérian. Juin 2007, il menace de partir pour salaire impayé : « Le potentiel est énorme ici, affirme-t-il. Si le football nigérian était géré par la fédération allemande, les Super Eagles seraient quasiment imbattables ! » Autant rêver

Jean-François Jodar
Un Coq pour les Aigles (Mali)
Imagine-t-on l’Élysée et Adidas s’associer pour recruter l’entraîneur de l’équipe de France ? Ou bien le chef de l’État brésilien Lula et la marque Nike désigner conjointement l’entraîneur de la Selação ? Au Mali, le pas a été franchi : l’équipementier Airness, avec le feu vert de la présidence de la République, a engagé, le 8 juillet 2006, le Français Jean-François Jodar et l’a « offert » à la Fédération malienne de football !
Ancien professionnel entre 1967 et 1983, Jodar (59 ans) a joué successivement à Reims, Lyon et Strasbourg. International à six reprises, ce footballeur doué et élégant a commencé sa carrière comme ailier gauche. Sa polyvalence l’amena à occuper un poste de défenseur où il s’imposa par sa vitesse, sa détente, son sens de l’anticipation et son souci de la relance précise.
En 1987, il devient membre de l’encadrement technique des équipes de France. Ses succès lui valent un contrat aux Émirats arabes unis où on lui confie les moins de 20 ans, puis les seniors. Remercié en 2005, il doit patienter jusqu’en juillet 2006 avant d’être recruté par Malamine Koné, le PDG d’Airness, qui en « fait cadeau » au Mali. Sa mission : qualifier les Aigles pour la CAN 2008. Tâche difficile pour cet éducateur habitué à inculquer son savoir-faire à des jeunes attentifs et dociles. Jodar s’est vite rendu compte qu’il ne disposait pas du meilleur effectif d’Afrique : « On a une bonne équipe, constata-t-il, mais il y a encore des insuffisances », notamment en défense et dans la construction collective. Les Aigles ont toutefois réalisé en 2006-2007 un parcours assez positif : 6 matchs, 3 victoires, 3 nuls, 10 buts marqués et 1 seul encaissé. Ce qui leur a permis d’arracher leur ticket pour le Ghana. Depuis 1994, le Mali a disputé trois CAN sur six et n’a pas dépassé la quatrième place. Fera-t-il mieux cette fois-ci ?

la suite après cette publicité

Reinhardt Fabisch
Un excentrique chez les Ecureuils (Bénin)
Anjorin Moucharafou, le fantasque président de la Fédération béninoise de football, a réussi la gageure d’embaucher, comme sélectionneur des Écureuils, Reinhardt Fabisch, l’aventurier allemand qui, depuis vingt ans, collectionne les « exploits » sur le continent.
Ancien joueur du Borussia Dortmund (Allemagne), il débarque en 1987 au Kenya pour y diriger la sélection nationale, les Harambee Stars. Après un court passage à Oman et au Népal, il est nommé, en 1991, à la tête de l’équipe du Zimbabwe où il accumule les extravagances. Surexcité, Fabisch multiplie provocations et excentricités. En 1991, lors d’un match opposant les Lions indomptables du Cameroun au Zimbabwe, l’extravagant sélectionneur n’a pas hésité à s’en prendre aux arbitres. Furieux qu’un juge de ligne ait signalé en position de hors-jeu l’un de ses attaquants, il s’élance vers lui et lui glisse dans la main une liasse de billets ! Résultat : un an de suspension et une amende équivalent à 3 000 euros.
Fabisch retrouvera l’équipe du Kenya en 1997. Mais lors des éliminatoires de la CAN 1998, l’Allemand fait de nouveau des siennes et écope de deux années de suspension pour avoir jeté, lors d’un match, une bouteille d’eau sur un arbitre assistant.
Après être passé par le Qatar, le Guatemala, puis les Émirats arabes unis, l’entraîneur globe-trotter atterrit, en décembre dernier, à Cotonou : « Les Écureuils peuvent réussir un miracle au Ghana, a-t-il déclaré. Si tout le peuple béninois reste uni derrière son équipe. »

Carlos Alberto Parreira
Un technicien au service des Bafana Bafana (Afrique du sud)
Le sélectionneur de l’équipe d’Afrique du Sud (depuis le 1er janvier 2007) aime les voyages et l’aventure. Ghana, Koweït, Émirats arabes unis, Arabie saoudite l’entraîneur a travaillé aux quatre coins du monde. Mais c’est surtout au sein de l’équipe nationale brésilienne que Carlos Alberto Parreira a exercé ses talents. En 1994, aux États-Unis, il offre la Coupe du monde à la célèbre Selação, mais trébuche douze ans plus tard en quarts de finale de la compétition contre la France de Zinedine Zidane.
Cet échec ne dissuade pas pour autant les dirigeants de la Safa (South African Football Association) de l’engager en janvier 2007 pour manager la sélection nationale. Sa mission : préparer les Bafana Bafana pour la Coupe du monde 2010. Salaire mensuel : 253 000 dollars (un record en Afrique). « Je ne suis pas en Afrique du Sud pour l’argent », se défend-il, tout en demandant à la Safa de ne pas s’ingérer dans sa gestion de la sélection sud-africaine à laquelle il entend bien imposer un nouveau style de jeu.
Parreira n’a jamais été un footballeur professionnel, ni un véritable technicien. C’est un spécialiste de la préparation physique auquel il a été souvent reproché de violenter la fantaisie naturelle du football brésilien, de brider ses « artistes » et d’imposer une tactique défensive. Hélas, les prestations (qu’elles soient officielles ou amicales) des Bafana Bafana en 2007 ont démontré que les principes du Carioca sont encore loin d’être assimilées par les Bafana Bafana

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires