Coup de tabac au Nigeria

Initialement prévu début janvier, le procès intenté par Abuja contre trois cigarettiers, une première sur le continent, n’aura lieu qu’en mars prochain.

Publié le 21 janvier 2008 Lecture : 2 minutes.

Les jeunes fumeurs nigérians ont encore deux mois pour s’en griller une tranquillement. Le 14 janvier, la cour d’Abuja a finalement ajourné au 17 mars le procès intenté par le gouvernement fédéral contre trois cigarettiers, British American Tobacco (BAT), Philip Morris et International Tobacco Ltd, à qui il réclame quelque 40 milliards de dollars de dommages et intérêts pour compenser le coût des maladies liées au tabac. L’affaire remonte au 25 juillet 2007, lorsque le gouvernement fédéral décide de porter plainte contre ces compagnies pour conduite illégale, enrichissement illicite et mise en danger de la vie des citoyens. Les autorités espèrent ainsi qu’elles mettent un terme à la promotion, la distribution et la vente de leurs produits aux mineurs. Et financent des campagnes de sensibilisation sur les dangers liés au tabac.
Une démarche inédite sur le continent, considéré par l’industrie mondiale du tabac comme l’un des derniers eldorados. En perte de vitesse en Europe et aux États-Unis, les principaux cigarettiers ont concentré, au fil des années, leurs activités dans les pays du Sud, où les marchés aussi « vitaux » que celui du Nigeria (70 millions d’habitants ont moins de 18 ans) aiguisent de plus en plus leur appétit.
L’offensive des grandes firmes ne date cependant pas d’hier. Déjà, en mars 1981, la compagnie américaine Philip Morris, désireuse de conquérir le Nigeria, assurait dans un document de stratégie commerciale que « l’adolescent d’aujourd’hui est le client potentiel de demain, et les fumeurs, dans leur grande majorité, le sont devenus quand ils étaient encore en bas âge ». En 1991, British American Tobacco (BAT) commandait une étude qui démontra par la suite que « les nouveaux fumeurs nigérians entraient sur le marché très tôt, généralement entre 8 et 9 ans ». Mais Abuja entend bien ne pas se laisser enfumer par le marketing prétendument social mis en place par ces compagnies, qui sponsorisent et équipent à tour de bras plusieurs commerces – de préférence situés aux abords des écoles en échange d’une présence de leurs produits. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 18 % des jeunes Nigérians seraient aujourd’hui fumeurs.
Cette guerre antitabac menée par le Nigeria – qui par ailleurs n’en a pas fini avec l’affaire Pfizer, le géant pharmaceutique américain accusé d’avoir mené des essais thérapeutiques mortels en 1996 – fait toutefois figure d’exception dans une Afrique où la plupart des pays peinent à mener une politique claire – et ambitieuse – en matière de santé publique.

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