Une élection qui change tout

Publié le 20 décembre 2004 Lecture : 2 minutes.

Pékin, mais aussi Washington, peuvent pousser un soupir de soulagement : les électeurs ont donné au Kuomintang la majorité absolue au Parlement de Taiwan, par 116 sièges sur 225. La coalition du président « indépendantiste » Chen Shui-bian n’a obtenu que 101 sièges. Le danger de voir l’île rebelle aller jusqu’à « compromettre la paix dans le détroit de Taiwan », selon les termes du président chinois Hu Jintao (voir pp. 20-21), est donc probablement écarté dans l’immédiat.
Jusqu’à la veille de ce scrutin, la tension était telle de part et d’autre du détroit qu’en dépit de l’indifférence manifestée par la communauté internationale, il y avait de quoi redouter un conflit armé entre les deux géants du Pacifique. À l’intérieur même de l’île de Taiwan, deux camps se faisaient face : les indépendantistes, vainqueurs des élections de mars, et les partisans du statu quo dans l’alliance des bleus du Kuomintang.

Si ces derniers ont obtenu leur revanche, c’est sans doute parce que leur adversaire Chen Shui-bian est allé trop loin. Il avait notamment ordonné de remplacer « Chine » par « Taiwan » dans toutes les administrations, ce qui n’était certes pas pour apaiser les relations avec Pékin. Ni pour plaire aux États-Unis, dont le secrétaire d’État Colin Powell a désapprouvé publiquement cette initiative.
Depuis presque dix ans, le « problème de Taiwan » est un casse-tête pour les « sinologues » occidentaux, qui comprennent mal pourquoi Pékin s’obstine à empêcher par « tous les moyens » – parmi lesquels le recours à la force – l’indépendance de l’île. Ces observateurs devraient prendre en compte la longue liste des défaites et des humiliations subies par la Chine, depuis la guerre de l’Opium en 1840 et la perte de Hong Kong pendant un siècle et demi jusqu’aux guerres sino-japonaises. Aujourd’hui que leur pays a retrouvé le chemin de la prospérité, pourquoi les Chinois admettraient-ils de le voir amputé de l’île de Taiwan, au détriment de son intégrité territoriale ? L’opinion nationaliste est tellement mobilisée qu’une reculade du Parti communiste sur ce point risquerait de lui faire perdre toute légitimité.
Mais il s’agit surtout que, pour les Américains, les choses soient claires : s’ils ne veulent pas d’un conflit militaire avec une puissance nucléaire, ils doivent cesser de soutenir l’indépendance de Taiwan. Même si Hu Jintao a pris soin de leur déclarer que la priorité de la Chine a toujours été le développement économique, avant même la réunification.

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En effet, la Chine fait presque figure, aujourd’hui, de moteur de l’économie mondiale : tous les gouvernements se ruent sur elle pour essayer de lui arracher des contrats et partager une partie du gâteau de sa croissance. Tous… sauf celui de Chen Shui-bian, qui a tout fait, à contre-courant, pour couper les liens entre l’île et le continent. Voilà pourquoi les élections législatives du « frère ennemi » ont tant intéressé les Chinois continentaux. Et il est un signe qui ne trompe pas : c’est la première fois que les internautes chinois ont approuvé massivement une élection à Taiwan !

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