Coup de pouce à l’après-pétrole

Le renchérissement des hydrocarbures renforce l’intérêt de certains investisseurs pour les énergies de substitution. L’Afrique, dans ce contexte, peut aussi tirer son épingle du jeu.

Publié le 20 décembre 2004 Lecture : 4 minutes.

1. Solaire : toujours coûteux

Une multitude de petites installations d’utilisation de l’énergie solaire ont fleuri sur le continent : cuiseurs, pompes à eau, chauffe-eau et séchoirs, éclairage ou relais pour la téléphonie mobile. Entre 1984 et 1990, en RDC, 750 systèmes d’éclairage et 100 systèmes de réfrigération pour le stockage de vaccins dans des dispensaires ruraux ont été installés, tirant leur électricité de panneaux photovoltaïques. Chaque année, en Tunisie, plus de 15 000 m2 de capteurs solaires pour l’eau chaude sanitaire sont installés, financés en partie par les aides publiques. Le Maroc a aussi lancé une vaste campagne nationale, avec l’objectif d’implanter 100 000 m2 de capteurs solaires en quatre ans. Outre ces pays, l’Égypte, le Sénégal et l’Afrique du Sud disposant chacun d’une capacité de plusieurs mégawatts (MW) d’électricité solaire. Après une première campagne, en 1998, qui avait permis d’équiper dix mille foyers, le gouvernement sud-africain a annoncé en juin 2004 le lancement d’une deuxième campagne pour fournir de l’énergie solaire à plus de 40 000 foyers, cliniques et écoles. Autre exemple, plusieurs usines de poisson ont reçu le soutien du Nepad pour utiliser l’énergie solaire. La première usine alimentée de cette manière a ouvert ses portes en Afrique du Sud en juin dernier. Sa production devrait atteindre 60 000 pièces dès l’an prochain. En Algérie, une centrale mixte gaz et solaire va être réalisée à Hassi R’mel, à proximité du plus vaste gisement de gaz naturel du pays : 180 000 m2 de miroirs paraboliques vont chauffer de l’eau pour alimenter une turbine à vapeur dotée d’une capacité de production de 25 MW d’électricité. La contribution du solaire demeure néanmoins encore anecdotique sur le continent. Malgré la baisse constante des coûts, la technologie photovoltaïque reste difficile à financer. L’objectif des constructeurs est de diminuer en quatre ans les coûts par deux, et d’augmenter le rendement actuel d’un tiers d’ici à 2010. En attendant, pour encourager l’émergence d’un secteur indispensable, le Kenya a montré l’exemple en ne taxant pas le matériel solaire.

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2. Éolien : la force du vent

Le principe des éoliennes n’a guère évolué depuis l’époque des moulins à vent, mais la combinaison de matériaux nouveaux et de pales aux formes optimisées a augmenté considérablement leur rendement. Toute une gamme de prix et de puissances est maintenant disponible. De petites éoliennes d’une dizaine de mètres de haut peuvent être fabriquées par un bon bricoleur, mais les plus hautes, qui peuvent atteindre plus de cent mètres de haut, sont construites par des sociétés spécialisées. Sur le continent, malgré la présence de nombreuses éoliennes de dimensions modestes, installées dans les zones rurales, le potentiel est largement inexploité. En Égypte, la capacité actuelle de production, estimée à 145 MW, devrait s’accroître à 650 MW d’ici à 2010. La Tunisie a déjà l’expérience d’un parc d’aérogénérateurs de 20 MW à Cap Bon, dans le Nord. Le pays a décidé de construire une nouvelle centrale éolienne de 100 MW, avec un financement de 10,6 millions de dollars du Fonds pour l’environnement mondial (FEM). Au Maroc, le parc éolien de Koudia el-Beida comprend 84 éoliennes et délivre une puissance de 50 MW. Trois autres parcs sont en cours de réalisation, pour une puissance totale de 600 MW. Le reste du continent s’adapte pour le moment à des investissements plus modestes. Au Ghana, par exemple, le gouvernement envisage de faire réaliser une série de petits parcs éoliens, le long de la côte Sud-Est, notamment pour permettre aux pêcheurs de conserver au frais leurs poissons. Mais de grands projets sont en vue, comme Sahara Wind, qui veut tirer parti de l’immense désert. Il serait l’une des plus grandes ressources éoliennes du monde. Des études montrent aussi qu’avec un taux d’équipement supportable la côte atlantique s’étendant du Maroc à la Mauritanie pourrait suffire à produire l’équivalent de la moitié de la consommation de l’Union européenne. Le débat entre les partisans des grands travaux et les défenseurs des paysages naturels n’est pas clos…

3. Biomasse : surexploitée, mal utilisée

Presque la moitié de l’énergie utilisée en Afrique provient de la biomasse, nom désignant tout matériau naturel d’origine non fossile. Mais actuellement, la principale utilisation consiste à brûler bois ou charbon de bois pour le chauffage ou la cuisine, ce qui accroît la déforestation et la pollution de l’air. Plusieurs solutions techniques permettraient d’utiliser la biomasse de manière plus efficace et plus propre. Au Mali, où le bois de feu et le charbon assurent plus de 90 % des besoins énergétiques des ménages, le Programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue) a soutenu une société locale qui produit des briquettes à partir de déchets agricoles et de sciure. La bagasse, sous-produit de la production de canne à sucre, dont environ 26 millions de tonnes sont produites chaque année en Afrique, est un autre résidu agricole qui pourrait être valorisé pour fournir de l’énergie. Autre débouché, les biocarburants, dont le principe consiste à mélanger de l’essence ou du gazole avec une huile d’origine naturelle. La production est quasiment inexistante en Afrique, en dehors de 400 000 m3 de bioéthanol sud-africain produits chaque année. Plusieurs projets sont à l’étude dans ce pays, dont une usine financée par le japonais Mitsui. Elle produirait 100 000 tonnes de carburant par an à partir d’huile de noix. Le potentiel végétal existe, mais le continent africain manque de financements et de moyens industriels. Si le prix du baril de pétrole reste élevé, l’option peut devenir rentable, non seulement pour la production locale, mais aussi pour exporter sur le marché européen. La société britannique D1 Oils, spécialisée dans ce domaine, a ainsi acquis les droits d’exploitation de 37 000 hectares de terre en Afrique, en Inde et en Asie pour cultiver des jatrophas, arbres dont la graine produit une huile assez abondante. Exemple à méditer, celui du Brésil, devenu en vingt ans le premier producteur mondial de bioéthanol à partir de la canne à sucre, couvrant 40 % de sa consommation en essence.

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