À Ould Daddah, la patrie reconnaissante

Publié le 21 octobre 2003 Lecture : 2 minutes.

Samedi 18 octobre. Les drapeaux sont en berne. Parti de l’aéroport de Nouakchott, le convoi funèbre se dirige vers la mosquée El-Attiq. Des milliers de Mauritaniens l’accompagnent. Ils sont venus rendre un dernier hommage au « père de la Nation », Moktar Ould Daddah, décédé le 15 octobre, à 1 heure du matin, à l’hôpital militaire du Val-de-Grâce, à Paris, à l’âge de 79 ans.

Le cortège a emprunté ensuite « la route de l’Espoir », tout un symbole. C’est en effet l’une des dernières routes asphaltées à avoir été inaugurée par le président Ould Daddah, deux mois avant d’être renversé par l’armée, le 10 juillet 1978. Longue de 150 km, la route de l’Espoir mène à Boutilimit, village natal de l’illustre défunt. Dès l’annonce de la disparition d’Ould Daddah, des centaines de Mauritaniens et de diplomates ont afflué à son domicile à Nouakchott. « Tous étaient unanimes pour saluer l’oeuvre d’Ould Daddah, même des jeunes qui ne l’ont jamais connu », déclare avec émotion son fils cadet, Azeddine, 33 ans.
Ould Daddah, dont tout le monde loue le courage et l’intégrité (voir page 115 le témoignage de Pierre Messmer), a passé quinze mois en prison dans le pays qu’il a fait naître (1978-1979). Libéré, il séjourne quelque temps en Tunisie – le premier pays à avoir reconnu la Mauritanie et qui a parrainé son entrée à l’ONU en 1961 – avant de se rendre en France. Son exil durera vingt-deux longues années. Il rentrera chez lui le 17 juillet 2001 (J.A.I. n° 2114). En octobre 2002, il a le bonheur d’assister à la naissance de son premier petit-fils, Hadrami, à Dakar. Moktar Ould Daddah venait d’achever la rédaction de ses Mémoires, Mauritanie contre vents et marées (éditions Karthala), dont J.A.I. a publié des extraits (n° 2231) et qui devraient paraître le 27 octobre.
« De juillet 2001 à fin avril 2003, nous avons résidé dans notre villa – notre seul bien au monde – à Nouakchott, témoigne son épouse Mariem. Moktar recevait amis et anciens collaborateurs en toute simplicité. Il a effectué un seul déplacement, à Boutilimit en décembre 2001. Mais le silence des autorités était pour lui regrettable. Pas d’accueil à l’arrivée, pas de visite après. Moktar n’a fait aucune déclaration politique. Comme à son habitude, il ne voulait ni diviser, ni jeter de l’huile sur le feu. »

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Le mal s’est déclaré en mars 2003. Une bronchite, selon le diagnostic d’un médecin. Fin avril, son état de santé se détériore brutalement. Mariem et son fils aîné, Mohamedoun (37 ans), l’emmènent à Paris où il est hospitalisé au Val-de-Grâce, aux frais de l’État français. La bronchite se révèle être une pleurésie. Après vingt-trois jours d’hospitalisation, il semblait rétabli, mais très affaibli. Le 11 août, en pleine canicule parisienne, il est victime d’une crise respiratoire. Les services d’urgence des Sapeurs-Pompiers de Paris – très sollicités ce jour-là – interviennent rapidement et le sauvent d’une mort certaine. En visite privée à Paris, le président Maaouiya Ould Taya se rend à son chevet début septembre. Mais il était écrit qu’il ne quitterait pas le Val-de-Grâce vivant. Entouré des membres de sa famille et de quelques amis, il partira dans un avion affrété par le gouvernement mauritanien vers sa dernière demeure, à Boutilimit.
Les services de l’ambassade mauritanienne ont fait preuve d’une grande diligence tant pour les formalités administratives que pour celles du retour. Enfin un geste de reconnaissance envers celui qui a « créé » la Mauritanie.

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