Certains s’en tirent, d’autres pas

Publié le 22 octobre 2003 Lecture : 3 minutes.

Les chefs d’État d’Afrique et d’ailleurs ne sont plus des demi-dieux. S’ils sont toujours protégés pendant l’exercice de leurs fonctions, ceux d’entre eux qui sont accusés de crimes graves n’ont plus la certitude d’échapper à la justice des hommes une fois redevenus des citoyens ordinaires.
Certains sont victimes d’une justice pour le moins expéditive. Francisco Macias Nguema, le féroce dictateur équatoguinéen (entre 1968 et 1979), fut ainsi condamné à mort pour trahison et prestement exécuté au lendemain de son renversement. Mais son cas reste exceptionnel : la plupart de ses « collègues » parviennent à éviter le peloton d’exécution. Deux fois condamné à mort (d’abord, en 1992 pour « crimes politiques », puis sept ans plus tard pour « crimes économiques »), Moussa Traoré, qui présida aux destinées du Mali de 1968 à 1991, vit d’abord sa peine commuée en prison à perpétuité avant de bénéficier d’une grâce présidentielle, en 2002.
De même, Jean-Bedel Bokassa, l’ex-« empereur » de Centrafrique, fut condamné à la peine capitale en 1987, après son retour d’exil, passa six ans en prison et finit par être gracié par André Kolingba, en 1993. Il est mort à Bangui, en 1996, dans le plus grand dénuement. Accusé d’avoir organisé en 2001 une tentative de coup d’État contre Ange-Félix Patassé, son successeur, ce même Kolingba sera à son tour condamné à mort par contumace,
puis amnistié en avril 2003, après l’arrivée au pouvoir de François Bozizé (voir J.A.I. n° 2231). Le 5 octobre, il a même été autorisé à rentrer à Bangui.
Le Soudanais Gaafar Nimeiri s’en est, lui aussi, bien tiré. Renversé en 1985, il est rentré de son exil égyptien en 1999 et a été amnistié par le président Omar el-Béchir, en dépit de plusieurs plaintes déposées contre lui pour des crimes qu’il aurait commis alors qu’il était au pouvoir. En exil au Togo, le Centrafricain Patassé pourrait bien ne pas bénéficier d’une telle mansuétude. Accusé de détournement de fonds et de crimes contre l’humanité, il devra rendre des comptes à la justice de son pays, s’il décide d’y revenir. À défaut, il pourrait être traduit devant la Cour pénale internationale, une plainte ayant été déposée contre lui. L’exil jusqu’à la mort : tel a été le sort d’Ahmadou Ahidjo, qui dirigea le Cameroun de 1960 à 1982. Accusé de complot contre la sûreté de l’État en 1983, il a été condamné à mort par contumace, l’année suivante, par un tribunal militaire. Il est mort en 1989 à Dakar, où sa dépouille repose toujours. Mobutu Sese Seko et Idi Amin Dada, les ex-dictateurs zaïrois et ougandais, ont évité l’humiliation d’un jugement, fût-ce par contumace. Le premier est mort en 1997, après un bref exil marocain (quatre mois). Le second a rendu l’âme dans une clinique saoudienne, au mois d’août dernier.
Seul l’exil a permis à d’autres anciens responsables d’échapper aux lourdes peines de prison prononcées contre eux lors de procès plus ou moins expéditifs. C’est notamment le cas du Congolais Pascal Lissouba, renversé en octobre 1997. En 1999, il avait été condamné à vingt ans de réclusion pour tentative d’assassinat contre Denis Sassou Nguesso, son successeur, puis, deux ans plus tard, à trente ans de travaux forcés pour « crimes de haute trahison ». Le Malgache Didier Ratsiraka, qui vit en France depuis juillet 2002, a pour sa part été condamné, au mois d’août, à dix ans de travaux forcés
pour « détournement de deniers publics ».
L’Éthiopien Mengistu Haïlé Mariam suit, depuis le Zimbabwe, où il réside depuis sa fuite en 1991, le procès de la « terreur rouge », dont il est le principal accusé. Commencé en décembre 1994, ledit procès devrait s’achever l’an prochain. Mengistu risque la peine de mort. Par contumace, bien sûr. Quant au Tchadien Hissein Habré, qui vit à Dakar, il est toujours poursuivi par la justice belge. Apparemment, les plaignants ne sont pas disposés
à renoncer. Un autre « ex- » devra passer par la case justice moins de deux ans après son départ de la présidence : accusé de multiples malversations, Frederick Chiluba doit en effet comparaître le 30 octobre devant les juges zambiens.

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