Le torchon brûle entre le patronat camerounais et l’administration fiscale
Célestin Tawamba, le président du Gicam, charge le directeur général des impôts dans une lettre adressée le 16 janvier au président Paul Biya. La réaction de ce dernier reste attendue.
Le 16 janvier, Célestin Tawamba, président du Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam), écrit au président Paul Biya pour se plaindre de l’attitude de l’actuel patron de la direction générale des impôts (DGI), Modeste Mopa Fatoing. Un fait inédit, mais aussi « une mise en accusation et, surtout, une demande explicite de limogeage », résume un observateur de l’environnement économique du pays.
Délibérément organisée, la fuite de la lettre patronale, ayant en objet : « Rupture consommée des relations entre le directeur général des Impôts et les entreprises », fait la Une des journaux économiques ce mercredi 22 janvier, qui en relaient de larges extraits et enflamme les réseaux sociaux.
La réforme fiscale du Gicam en question
Sur un ton comminatoire, le patron des patrons reproche au patron de la DGI, entre autres, « son inaptitude à dialoguer et à faire face à la contradiction, le refus de délivrer des documents administratifs qui a entraîné des retards considérables dans la réalisation des investissements, son incapacité à concevoir une politique fiscale à court et moyen termes de nature à impulser la croissance tout en assurant un niveau appréciable de recettes à l’État, sa méconnaissance de la réalité de l’entreprise », selon les termes de la lettre que Jeune Afrique a pu consulter.
La goutte d’eau qui fait déborder le vase, aux yeux de Célestin Tawamba, étant son « hostilité à une proposition de réforme fiscale du Gicam dans laquelle il avait cru percevoir une tentative du secteur privé de se substituer à l’État, et cela en dépit des instructions de sa hiérarchie. »
Les arbitrages en matière budgétaire et fiscale se font à la présidence
La pierre angulaire du document de réforme fiscale du Gicam de fin 2018, fort de plus de 300 pages, étant de ramener le minimum de perception sur le chiffre d’affaires de 2,2 % à 1,1 %. Ce qui ferait un gain de 51 milliards de F CFA (77,7 millions d’euros) aux entreprises. Du reste, Célestin Tawamba, par ailleurs fondateur du groupe Cadyst Invest, ne cesse de plaider l’abandon d’une fiscalité assise sur l’activité au profit d’une fiscalité reposant sur le bénéfice.
Le Cameroun sous programme avec le FMI
Dans l’entourage de Modeste Mopa, on tente de relativiser. « Le DGI ne s’oppose à rien. Les arbitrages en matière budgétaire et fiscale se font à la présidence », laisse entendre un cadre de l’administration des impôts, tout en rappelant que 71 % des propositions du Gicam furent validées dans le cadre d’un comité de pilotage mis en place en 2018 par le ministre des Finances, Louis Paul Motaze, et entrent progressivement en application.
« Les 29 % restants dans lesquelles figure la question du minimum de perception requièrent des études approfondies de leur impact, le tout alors que le Cameroun est sous programme avec le FMI. D’ailleurs le ministre des Finances l’avait fait savoir au patronat le 3 novembre 2018, à Douala », ajoute notre source.
Destinataire de la missive, Paul Biya reste pour le moment sans réaction.
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