Algérie : un an après, les organisations du « Hirak » resserrent les rangs
Une alliance de partis et d’associations liés au « Hirak » s’est engagée samedi 25 janvier, à Alger, à rassembler les forces de ce mouvement de contestation populaire inédit face à un pouvoir qu’elle accuse d’ « autoritarisme ».
Regroupée au sein du Pacte pour l’alternative démocratique (PAD), cette coalition anti-régime a organisé des « assises pour l’alternative démocratique » pour discuter de l’avenir du « Hirak » après la présidentielle du 12 décembre, qualifiée de « mascarade électorale », qui a abouti à l’élection d’un nouveau chef d’État, Abdelmadjid Tebboune.
Le PAD s’est constitué après la démission en avril dernier, sous la pression de la rue, du président Abdelaziz Bouteflika, afin d’élaborer un cadre au changement du « système » en place depuis l’indépendance du pays en 1962, notamment via la mise sur pied d’institutions de transition.
Il comprend notamment le Front des forces socialistes (FFS) et le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), deux partis d’opposition, mais aussi la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH) ou le Rassemblement Action Jeunesse (RAJ).
Déclenché le 22 février 2019, « le « Hirak » a lancé le processus d’un État de droit pour fermer définitivement la page de la dictature militaire », a plaidé Mohcen Belabbes, le président du RCD, devant quelque 200 participants.
« Reprendre l’initiative politique »
Dans une « plateforme pour l’aboutissement démocratique de la révolution citoyenne », adoptée à la fin des travaux, les participants exigent « l’organisation d’une période de transition démocratique à même de satisfaire les aspirations légitimes du peuple algérien ».
Pour ce faire, les forces du PAD « œuvrent à la tenue d’une Conférence nationale indépendante du système », souligne la plateforme. « Celle-ci rassemblera toutes les forces agissantes de la société qui (…) refusent le coup de force du 12 décembre et le processus de restauration de l’autoritarisme », détaille le document.
En réponse à la vague de protestation, Abdelmadjid Tebboune, un ancien fidèle d’Abdelaziz Bouteflika, dit vouloir encourager le dialogue. 94 personnes détenues pour des faits liés au « Hirak » ont été remises en liberté ces dernières semaines, selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD). Mais 124 restent emprisonnées. Une motion de soutien aux « détenus politiques et d’opinion » a été lue samedi devant l’assistance.
Le président Tebboune promet une réforme de la Constitution et un comité d’experts a été instauré pour la préparer. Il a entamé des consultations avec des personnalités politiques, dont certaines réputées proches de la contestation, afin de parvenir à la promulgation d’une « Constitution consensuelle » qui serait soumise à référendum.
Selon lui, « l’avis de tous sera pris en compte en ce qui concerne la méthodologie à suivre, mais également les problèmes dont souffre le pays ».
« Dans un mois, c’est le 1er anniversaire de la révolution. Aujourd’hui, la rue exprime le rapport de force mais il n’est pas suffisant. Il faut reprendre l’initiative politique de façon à casser l’agenda du pouvoir qui s’impose contre nous et est en train de se recomposer », a plaidé samedi Salhi, vice-président de la LADDH.
« Forces émergentes »
Si, à l’approche du 1er anniversaire du « Hirak », la mobilisation est importante chaque semaine à Alger et dans certaines villes de province, elle marque le pas par rapport aux manifestations monstres du printemps 2019 ou aux cortèges ayant précédé la dernière présidentielle.
Dans ses rangs mêmes, beaucoup s’interrogent sur la direction que doit prendre ce mouvement sans structure formelle, pluriel et pacifique.
« Le Hirak a commencé comme un mouvement de contestation pure. Au bout d’un an, il semble devoir passer de la contestation à la proposition », explique Louisa Aït Hamadouche, professeur en sciences politiques à l’université d’Alger.
Pour cette politologue, la constitution de collectifs ou de regroupements de l’opposition « a pour point commun d’œuvrer à une véritable transition démocratique et un changement profond du système de gouvernance ».
Parallèlement à la plateforme du PAD, un collectif d’intellectuels vient de lancer un appel en faveur d’ »une conférence nationale fédératrice » du « Hirak ».
Les signataires de cet appel, au nombre de 120 (universitaires, avocats, journalistes, étudiants) ambitionnent de faire « converger toutes les initiatives » des parties liées au mouvement de contestation.
« Ces forces émergentes aujourd’hui sont les embryons des partis, syndicats et organisations de demain. Il est naturel et salutaire que le « Hirak » permette la naissance d’une nouvelle classe politique », analyse Louisa Aït Hamadouche.
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