RDC-Rwanda : fin de cavale pour Angéline Mukandutiye, incarnation du génocide au féminin
Recherchée pendant 25 ans pour sa participation au génocide contre les Tutsi, la Rwandaise Angéline Mukandutiye a été transférée au Rwanda par la RDC, au milieu d’un groupe d’anciens rebelles, avant d’être reconnue puis incarcérée à Kigali. Une arrestation qui met en lumière le rôle joué par les femmes dans le génocide de 1994.
Le 21 décembre 2019, une vieille dame affaiblie au visage creusé, portant un pagne traditionnel, apparaît aux informations de la télévision rwandaise. Difficile pour ceux qui ne l’ont jamais rencontrée de l’associer à l’ancienne inspectrice des écoles primaires et chef de milice Angéline Mukandutiye, une des génocidaires les plus recherchées par Kigali depuis juillet 1994. Elle fait partie des femmes et enfant transférés au camp de Nyarushishi, au Rwanda, après l’arrestation par l’armée congolaise de près de 300 membres d’un groupe rebelle armé rwandais semant la terreur au nord-est de la RDC. Jugée par contumace par les tribunaux traditionnels gacaca en 2008, elle purge désormais sa peine de réclusion criminelle à perpétuité.
Quartier général des Interahamwe
La participation des femmes hutu au génocide contre les Tutsi du Rwanda a été massive. Si certaines ont tué de leurs propres mains, la majeure partie d’entre elles ont encouragé les tueurs, dénoncé les Tutsi, participé à leur humiliation et pillé leurs biens. Mais Angéline Mukandutiye se distingue de la masse de ces tueuses ordinaires. Pour la rescapée Marie-Louise Nyirinkwaya, elle est « la plus redoutable de toutes ». Elle planifie et organise les tueries depuis sa maison, véritable quartier général des Interahamwe, la milice armée, qui est sous ses ordres dans son secteur.
Cheffe de guerre, elle se rend à plusieurs reprises dans les lieux où les Tutsi se réfugient en masse pour sélectionner les hommes à tuer. Elle participe également à l’assassinat d’intellectuels recherchés par le gouvernement génocidaire comme le journaliste André Kameya. Elle agit de concert, notamment, avec Tharcisse Renzaho, le préfet de Kigali-ville, et Odette Nyirabagenzi, conseillère du secteur de Rugenge à Kigali. Elle serait également impliquée dans des actes de torture, notamment sur des femmes tutsi.
Pas une mouche ne volait lorsque Madame l’inspectrice rendait visite
Née en 1951 à Gisenyi, dans le nord du Rwanda, au sein d’une famille tutsi, Angéline Mukandutiye est connue au début des années 1990 comme l’inspectrice des écoles primaires de Nyarugenge, une commune faisant partie de Kigali. Mère de quatre enfants, elle est mariée à un Hutu lié à la famille du président Juvénal Habyarimana.
Enseignante connue de tous dans son quartier, elle s’occupe des enfants du voisinage et s’investit dans le domaine culturel, notamment en ce qui concerne la danse. « On avait intérêt à connaître son nom pour nos examen d’éducation civique. Il fallait nous voir quand elle rendait visite l’école primaire de Kacyiru. Pas une mouche ne volait lorsque Madame l’inspectrice rendait visite », explique Marie-Yolanda Ujeneza, élève dans une école de son secteur de 1987 à 1992.
Premières discriminations
Lorsque Marie-Yolanda se cache chez les sœurs de Calcutta, fin avril 1994, avec sa mère, au sein de ce qu’elle appelle « le fief d’Angéline », celles-ci les préviennent qu’elles ne pourront les protéger de la seule personne qu’elles craignent : l’inspectrice Mukandutiye, qui a déjà raflé des enfants tutsi de l’orphelinat quelques jours avant leur arrivée.
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