Des rives du Sine aux bords de la Seine

Hervé Bourges reprend, étape par étape, le parcours de Senghor, qu’il a souvent croisé.

Publié le 21 mars 2006 Lecture : 2 minutes.

Voici l’ancien président du Sénégal disparu en décembre 2001 célébré autrement que par le seul texte. Léopold Sédar Senghor, lumière noire, l’ouvrage qu’Hervé Bourges, journaliste, homme de radio et de télévision, lui consacre, propose, outre un Senghor dans le texte, une galerie d’images pour dire le poète et le président, l’homme privé et l’homme d’État. À l’arrivée, un long portrait, fouillé et précis qui court sur près de 200 pages illustrées de photos et de documents parfois inédits. Il y a de l’exégèse, bien sûr, mais Bourges n’en fait pas moins un travail de journaliste en allant à la source : l’uvre de l’écrivain, mais aussi le regard de certains de ses proches, amis ou collaborateurs. Il reprend, étape après étape, le parcours du poète-président, qu’il a lui-même souvent croisé.
Chemin faisant, Bourges invite à la découverte de ce dernier, des rives du Sine aux bancs de l’Académie française, sur les bords de Seine, en passant (après le baccalauréat en 1927) par le lycée Louis-le-Grand – et non l’École normale supérieure de la rue d’Ulm, à Paris, comme indiqué dans une légende de la page 55. De l’enfance à Joal chez le père, Diogoye Basile, et à Djilor chez l’oncle maternel, Toko Waly, aux vingt années passées au Palais de l’ex-avenue Roume, dans la capitale sénégalaise, en passant par le petit séminaire de Ngasobil et le collège Libermann de Dakar Tout y est. Y compris, entre Joal et Djilor, le sanctuaire de Mbissel vers lequel Senghor se tourne quand il veut ressusciter l’univers de son enfance.
Malgré le souvenir prégnant des visites du roi Coumba Ndoffène à son père, l’homme de pouvoir ne perce pas encore chez le jeune garçon, mais le poète si, qui sur cette terre de Sine trouve un terreau favorable. « Que dans ces premières années, écrit Hervé Bourges, Senghor ait vécu une vie pleine, à la fois entouré d’affection, plongé dans un univers riche de sensations et de mystère, bercé par un rythme oral, vocal, musical, conçu à l’unisson de la nature qui l’enveloppait de toute part, c’est ce dont toute son uvre témoigne. »
Bourges aime ce Senghor-là et ne s’en cache pas. Au risque de friser l’hagiographie, il applaudit l’homme qui « est passé au français sans abandon. [Qui] y est passé en gardant les clés de ce royaume mental où il n’a cessé de circuler, et vers lequel il a tracé de nouvelles routes, celle d’une reconnaissance universelle [Qui] a été l’artisan le plus ferme et entêté d’une rencontre effective entre les peuples d’Europe et d’Afrique » Mais le journaliste n’oublie pas l’engagement militant du premier agrégé africain de grammaire, notamment aux côtés de Léon-Gontran Damas ou d’Aimé Césaire. Moins radical qu’eux, moins replié sur lui-même aussi. Plus enclin au métissage. Plus ouvert. Senghor le restera et ne cessera de le proclamer, de sa descente dans l’arène politique, à l’âge de 41 ans, à son départ volontaire du pouvoir un jour de décembre 1980.

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