Un cas étrange repéré au Texas

Publié le 21 janvier 2003 Lecture : 2 minutes.

Tout le monde sait que les aveugles (dois-je dire les non-voyants ?) entendent mieux que le commun des mortels. La perte d’un sens semble aiguiser les autres. Partant de ce principe, mon collègue Jamal a obtenu des fonds du CNRS pour tenter d’établir la loi inverse : à savoir que mieux on voit, moins on entend. Voilà comment il a procédé. Vingt cobayes ont été choisis dans la population mâle d’une ville moyenne. À leur insu, ils ont été filmés et enregistrés pendant la finale de la Coupe du monde de football. Au milieu de la première mi-temps, leurs épouses – qui étaient de mèche avec Jamal – sont entrées dans le salon en annonçant ceci :
– Mon chéri, je te quitte, je demande le divorce, je garde la bagnole et l’appart’, adieu. Aucun des cobayes n’a réagi à cette annonce. Mieux : aucun ne s’est même retourné vers sa femme, ce qui prouve qu’ils étaient tous devenus complètement sourds. Au même moment, Jamal, planqué au pied de l’immeuble dans une camionnette banalisée, enregistrait leurs commentaires. Voici des extraits de son log-book :
– Il est nul, l’arbitre, il n’a pas vu ce tacle par derrière ?
– Mais non, il n’était pas hors jeu !
– Il a arrêté la balle avec sa main !
– Ce n’est pas Ronaldo qui a marqué, c’est l’arrière qui a dévié la balle. Sachant qu’un écran de télévision est mille fois plus petit qu’un stade de football, que le match se déroule en Asie, que les caméras sont à une distance d’au moins trente mètres par rapport à l’action, Jamal en a déduit – c’est de l’arithmétique élémentaire – que chacun des cobayes avait une acuité visuelle cent mille fois supérieure à celle de l’arbitre. Une telle performance se paie naturellement par la perte totale de l’acuité auditive. On ne peut pas tout avoir.
Fort de ce succès, Jamal a sollicité une autre subvention du CNRS. Cette fois-ci, il va tenter d’expliquer une caractéristique encore plus insolite de l’espèce humaine, une caractéristique que l’on n’observe que chez certains hommes politiques : la perte d’un sens, au lieu d’aiguiser les autres, entraîne également leur disparition.
– Je vais m’intéresser au cas d’un certain Bush George, me dit-il, un Texan un peu falot. On a beau lui montrer des vidéos de gamins palestiniens tués par balles, il répète « Sharon est un homme de paix ! », ce qui prouve qu’il ne voit rien. On a beau lui lire le rapport des inspecteurs de l’ONU, qui n’ont rien trouvé en Irak, il ne cesse de clamer « Saddam a la bombe ! », ce qui prouve qu’il n’entend rien non plus. Un vrai cas pathologique ! Moins il voit, moins il entend. Un jour, tu verras, on parlera de « bushisme aigu » pour désigner cette maladie…

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