[Chronique] Blindés non conformes livrés au Mali : arnaque ou amateurisme ?
Le ministre malien de la Défense exige le remplacement de certains blindés livrés à l’armée. Encore obscure, l’affaire suscite interrogation, voire indignation.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 21 février 2020 Lecture : 2 minutes.
On dirait la réclamation d’un internaute à une plateforme d’achat en ligne, à la suite de l’acquisition d’une paire de chaussettes ou d’une brosse à dents électrique en mode « satisfait ou remboursé ». La procédure de plainte serait banale si le client n’était pas un État en crise sécuritaire aiguë et si les produits concernés n’étaient pas des blindés.
Dans un communiqué du ministère malien de la Défense et des anciens combattants, rendu public ce 17 février, le gouvernement indique avoir reçu une livraison partiellement « non conforme » de 50 blindés Typhoon – sur 100 commandés –, des véhicules militaires de type « MRAP » (Mine Resistant Ambush Protected) conçus pour résister aux engins explosifs dits « improvisés » et à toutes sortes d’embuscades.
Le document ministériel précise que c’est la « Direction du matériel, des hydrocarbures et du transport des armées (DMHTA), qui, après avoir fait le constat que certains engins livrés ne répondaient pas aux caractéristiques techniques stipulées dans le contrat, s’est abstenue de réceptionner les engins non conformes ». Comme pour les chaussettes ou la brosse à dents, le fournisseur émirati a accepté « le remplacement du reliquat des blindés non conformes », 15 sur 50 livrés. Tout irait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes des marchands d’armes.
Défaillance politique ?
Pour le grand public agacé et les journalistes interloqués, le communiqué soulève tout de même plus de questions qu’il n’apporte de réponses. La contrariété mâtinée de suspicion est d’autant plus palpable qu’il y a à peine un semestre, un rapport d’audit sur un marché d’avions militaires maliens avait dévoilé un scandale de deux milliards de F CFA de surfacturation.
En attendant d’obtenir plus de détails sur cette affaire de blindés, le bouche à oreille numérique charrie des questionnements : y a-t-il eu défaillance politique dans la chaîne d’acquisition ? Le fournisseur a-t-il cherché à flouer l’une de ces nations africaines ?
Que la non-conformité des blindés ait été identifiée avant validation de la réception pourrait être mis au crédit d’une armée malienne qui démontre ainsi ne pas « boire l’eau par les narine ». C’est essentiel en cette période où celle-ci tente de se réaffirmer, en pleine guerre contre les groupes armés terroristes, quelques jours après l’installation de bataillons « nouvelle formule » à Kidal et à Tombouctou.
C’est primordial, également, au moment où le Mali doit assumer ses choix stratégiques, face à la France mise à l’index et des partenaires du G5 Sahel prudents sur les perspectives de négociation avec les jihadistes. Le « Typhoongate » fera-t-il long feu ?
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