Coronavirus : quelles conséquences économiques pour l’Afrique ?
Bien que relativement épargné par l’épidémie, le continent en subit les conséquences économiques, notamment du fait de la limitation au strict minimum des déplacements des personnes et de la chute des cours des matières premières.
L’épidémie chinoise de coronavirus, qui inquiète le monde depuis la fin janvier, n’a touché à ce jour qu’une seule personne – aujourd’hui guérie, selon l’OMS – sur le continent, en Égypte.
Malgré sa quasi-absence du continent, le virus a déjà eu d’importantes conséquences économiques, à commencer par les difficultés de déplacement depuis et vers la Chine, des personnes – en avion –, comme des marchandises – en bateau -, ce qui impacte les échanges commerciaux entre l’Afrique et l’empire du milieu.
Les transporteurs maritimes, obligés d’annuler leurs escales chinoises du fait de l’épidémie, estiment à 350 millions de dollars leur manque à gagner par semaine à l’échelle mondiale. Une perte qui provient en bonne partie de la limitation au strict minimum des dessertes Afrique-Chine, en temps normal cruciales pour remplir les réservoirs des véhicules chinois, et approvisionner l’industrie métallurgique de Tianjin, Shanghai et Guangzhou. Les ports d’Afrique de l’Est – de Djibouti à Dar Dar es Salaam – situés sur les nouvelles routes de la soie, sont les plus affectés.
Du côté du tourisme – de loisir et d’affaires -, des pays comme le Maroc, l’Égypte, l’Afrique du Sud, l’Éthiopie et le Kenya, qui avaient commencé à séduire la clientèle chinoise, souffrent également. En 2019, 150 000 touristes chinois sont venus dans le royaume chérifien, et 250 000 étaient espérés en 2020 selon les prévisions de l’Office national du tourisme (ONMT). Mais les professionnels du secteur savent déjà qu’ils n’arriveront pas à atteindre le chiffre de l’année dernière.
L’or tire parti de son statut de valeur refuge
Les effets indirects de cette crise sanitaire commencent aussi à se faire sentir via les chutes des cours des matières premières clefs du commerce Afrique-Chine, au premier rang desquels on trouve le pétrole, le cuivre, le cobalt, le fer et le zinc.
Le prix du Brent est ainsi passé de 66 à 59 dollars le baril entre le 22 janvier, date où l’épidémie est reconnue officiellement à Wuhan, et le 20 février, avec un creux de la vague à 53 dollars le baril le 10 février. Si tous les grands pays producteurs de brut du continent – Algérie, Nigeria et Angola en tête – sont touchés par cette baisse, ceux qui ont pour premier client la Chine souffrent davantage que les autres. L’Empire du milieu représente notamment 61 % des exportations de brut de l’Angola et 95 % de celles du Soudan du Sud, où sont installés les chinois CNPC et Sinopec. Il doivent actuellement stocker tout ou partie de leurs productions destinées à Pékin en attendant des jours meilleurs.
Le Nigeria est moins tourné vers le géant asiatique – à peine 1 % de sa production pétrolière prend cette direction – mais, encore plus dépendant du brut qui représente 94 % de ses échanges commerciaux et plus de la moitié des revenus de l’État. De ce fait, la baisse du cours du baril, liée au coronavirus, le touche aussi de plein fouet. Le FMI a revu d’ailleurs revu à la baisse, le 17 février, ses prévisions de croissance pour Abuja en 2020, passées de 2,5 % à 2 %.
Le même impact est ressenti chez les pays producteurs des minerais prisés par Pékin. Depuis le 22 janvier, le cours du cuivre est passé de 6 300 à 5 700 dollars la tonne le 20 février. Une baisse qui va affecter nécessairement la RDC et la Zambie, qui en sont les deux premiers exportateurs africains, et où sont implantés plusieurs grands producteurs chinois, tel que China Molybdenum, le repreneur de Tenke Fungurume Mining, près de Kolwezi.
Les cours du zinc – dont l’Afrique du Sud et l’Érythrée sont de grands producteurs – et du fer – crucial pour la Mauritanie – sont également affectés, dans les mêmes proportions que le cuivre. Par ailleurs, s’il n’y a eu que peu de perturbation sur le cours du cobalt, dont la RDC est le premier producteur mondial, et dont les fabricants chinois de batterie sont friands, l’expédition de ce minerai vers Pékin étant quasiment impossible du fait du coronavirus, il en résulte un manque à gagner pour cette filière à Kinshasa.
Reste une filière qui tire son épingle du jeu, celle de l’or, qui profite plus que jamais de son statut de valeur refuge : en progression constante depuis une année, le prix de l’once atteint actuellement des sommets, dépassant les 1600 dollars le 20 février. Une conjoncture qui devrait profiter au Mali, au Burkina Faso, au Soudan, au Ghana et à l’Afrique du Sud.
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