Cousin/cousine, ou le test ADN à la hollandaise

Publié le 21 novembre 2007 Lecture : 2 minutes.

Les candidats à l’immigration aux Pays-Bas devront bientôt se soumettre à un test ADN, non pas pour établir leur identité mais pour prouver qu’ils n’ont pas l’intention d’épouser leur cousin ou leur cousine C’est la situation rocambolesque à laquelle on risque d’arriver si le projet de loi présenté par le parti libéral VVD le 12 novembre est adopté par le Parlement.
Comment en est-on arrivé là ? Depuis des années, les partis de droite représentés à La Haye essaient de limiter l’immigration en provenance de pays non européens. Avec un certain succès : le regroupement familial a été réduit de moitié en quelques années, notamment après l’instauration d’un test préalable à l’obtention d’un visa. Pour s’installer aux Pays-Bas, il faut passer dans le pays d’origine un test prouvant qu’on maîtrise les rudiments du néerlandais et qu’on connaît les « valeurs » du pays d’accueil ainsi que son histoire, sa Constitution, etc.

Cependant, même avec le test d’entrée, trente mille Turcs et Marocains se sont quand même installés en Hollande l’an dernier, la plupart pour rejoindre leur conjoint. C’est ce chiffre que le parti libéral veut réduire à cinq mille par an, au maximum. Et c’est là qu’entre en scène ce qu’on pourrait appeler « l’amendement cousin/cousine ».
Suivez le raisonnement, il est très subtil. Pour Henk Kamp, le député VVD qui est à l’origine du projet de loi, le problème n’est pas l’immigration en tant que telle (encore que) mais le fait qu’elle concerne en majorité des gens qui n’ont aucune chance sur le marché du travail. En effet, il s’agit – selon lui – de paysan(ne)s du Rif ou d’Anatolie qui, une fois installé(e)s à Amsterdam ou Rotterdam, resteront à la maison et vivront de l’aide sociale. C’est surtout dans le cas des femmes que ce scénario risque de se réaliser : le macho qui les a fait venir de leur bled lointain ne voudra de toute façon pas les laisser sortir dans la rue (où elles seraient exposées à toutes les tentations de la vie moderne), ni se mêler à la population locale (tous des mécréants). Mais comment distinguer le macho arriéré de l’époux moderne ? Simple : le premier, conformément aux traditions ancestrales (sic) du Rif et de l’Anatolie, a tendance à épouser sa cousine (re sic). D’où le test ADN : s’ils sont cousins, c’est qu’ils sont arriérés Halte-là ! On ne passe pas ! On reste dans sa montagne !
Avec un tel raisonnement, le plus grand poète anglais, lord Byron, qui avait carrément épousé sa demi-sur, aurait été classé « analphabète grave » par le VVD et n’aurait jamais pu entrer au pays des tulipes
Il n’est pas sûr que l’amendement soit adopté par le Parlement. Ne serait-ce que parce que tout le monde étant plus ou moins cousin dans le Rif, il reviendrait à interdire aux gens de se marier, ce qui est contraire à la Déclaration universelle des droits de l’homme. Notons que celle-ci a été inspirée par les philosophes des Lumières, dont un certain Voltaire, qui vivait en concubinage avec madame Denis : sa propre nièce

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