Safaricom doublement récompensé par le lobby mondial des télécoms

L’opérateur kényan a été récompensé fin février par l’association GSMA, à la fois pour la « contribution remarquable à l’industrie du mobile » que constitue la création du paiement mobile et pour DigiFarm, son application destinée aux agriculteurs.

Une agence M-Pesa à Nairobi. © Sayyid Abdul Azim/AP/SIPA/2011.

Une agence M-Pesa à Nairobi. © Sayyid Abdul Azim/AP/SIPA/2011.

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Publié le 2 mars 2020 Lecture : 3 minutes.

Treize ans après avoir inventé le paiement par mobile avec l’application M-Pesa, l’opérateur télécoms kényan Safaricom se voit récompensé pour sa « contribution remarquable à l’industrie du mobile », par l’Association des opérateurs et constructeurs de téléphonie mobile, GSMA dans le cadre des Global Mobile (Glomo) Awards.

Annoncées via communiqué de presse, les récompenses auraient dû être remises lors du Mobile World Congress de Barcelone. Mais l’événement qui réunit en février de chaque année la fine fleur des télécoms et de l’innovation mondiale a été annulé suite à de multiples défections de la part de multinationales de la tech pour cause de coronavirus.

Au Ghana, les transactions par mobile ont représenté 70 % du PIB en 2018

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Bouleversement des usages

L’innovation apportée par l’opérateur kényan a non seulement permis d’accélérer la pénétration du téléphone mobile au Kenya et plus largement révolutionné la façon dont les Africains, et notamment les tranches les plus éloignées des services financiers traditionnels, effectuent leurs transactions financières.

Outre le transfert d’argent, les applications permises par le mobile money se sont élargies depuis 2007 au paiement de factures ou d’impôts, aux transactions marchandes sur internet ou dans les commerces. Par conséquent, le mobile money dont les transactions en Afrique subsaharienne doublent en volume comme en valeur chaque année depuis 2016, contribue à lui seul à une large partie du produit intérieur brut (PIB) de certains pays. « Il faut se rendre compte qu’au Ghana par exemple, les transactions par mobile ont représenté 70 % du PIB en 2018 contre 1 ou 2 % dans certains pays européens », rappelle Dario Giuliani, fondateur du cabinet de conseil Briter Bridges.

Le succès de M-Pesa a également inspiré les concurrents de Safaricom, mais aussi les banques, à développer leurs propres services de paiement par mobile. Fin décembre 2018, l’Afrique subsaharienne comptait 132 applications dédiées. Ces dernières cumulaient près de 146 millions de comptes actifs et enregistraient 1,7 milliard de transactions, pour un total de 26,8 milliards de dollars.

Le modèle est aussi la figure de proue de la tech africaine et participe à attirer l’attention des investisseurs étrangers sur les start-up continentales. En 2019, 54 % des plus de 2 milliards de dollars investis dans les start-up africaines ont concerné des fintech ou des solutions d’inclusion financière selon les chiffres du fonds d’investissement Partech Africa.

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Des offres dédiées aux professionnels

De son côté, Safaricom, contrôlé par le Britannique Vodafone via sa filiale Vodacom, ne s’est pas contenté de capitaliser sur le succès de son invention. L’opérateur a continué à développer ses services, répondant à des besoins comme le crédit et l’épargne (M-Shwari), l’investissement financier (application Mali) ou même le découvert bancaire (Fuliza).

L’opérateur s’adresse également aux professionnels, notamment aux agriculteurs, via l’application DigiFarm, elle aussi récompensée par la GSMA en tant que « meilleure innovation mobile pour les marchés émergents ». La plateforme fournit aux petits exploitants la possibilité d’acheter des intrants et de se renseigner sur leurs prix mais aussi un accès au financement, le tout par le biais de code USSD. Elle compte selon Safaricom plus d’un million d’utilisateurs.

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Le 28 février, l’entreprise qui sera dirigée à partir d’avril par Peter Ndegwa, en remplacement de Michael Joseph, a annoncé avoir noué un partenariat avec Amazon Web Service (AWS), la filiale dédiée au stockage de données du géant américain du e-commerce. Ce partenariat de taille doit lui permettre d’aller plus loin dans ses offres aux professionnels, en distribuant les services de stockage par le cloud à ses clients est-africains. Rien n’a filtré pour le moment sur les synergies que AWS pourraient offrir à la galaxie M-Pesa.

Avec ses 23,6 millions de clients actifs dans sept pays africains à la mi-2020, la poule aux œufs d’or de Safaricom a pris une telle place dans son activité (un tiers de son chiffre d’affaires) que l’opérateur réfléchit désormais à en faire une entité indépendante afin d’accroître sa valeur. L’entreprise pourrait être ainsi valorisée à 1,5 milliard de dollars.

Parmi les autres lauréats d’une des 35 récompenses remises par GSMA, la start-up américaine KaiOS Technologies, à l’origine d’un système d’exploitation adapté aux téléphones non tactiles, qui a reçu le prix de la « meilleure percée technologie de l’année dans la catégorie des entreprises au chiffres d’affaires inférieur à 10 millions de dollars ».

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