Génocide des Tutsi au Rwanda : la journaliste Linda Melvern expose la fabrique du négationnisme

Dans un essai fouillé, « Intent to Deceive », la journaliste d’investigation Linda Melvern décortique méthodiquement la stratégie mise en place par les génocidaires rwandais pour faire valoir leur lecture biaisée de l’histoire.

Une exposition de photos au Centre du mémorial du génocide à Kigali, en avril 2014. © Ben Curtis/AP/SIPA

Une exposition de photos au Centre du mémorial du génocide à Kigali, en avril 2014. © Ben Curtis/AP/SIPA

Publié le 8 mars 2020 Lecture : 6 minutes.

En avril 2014, vingt ans après le génocide des Tutsi, la BBC diffusait le documentaire Rwanda’s Untold Story (« Rwanda, l’histoire jamais racontée »), relayant la thèse d’un double génocide dont les principales victimes seraient en fait des Hutu.

Dix ans plus tôt, pour le dixième anniversaire des tueries, c’est l’enquête controversée du juge français Jean-Louis Bruguière, accusant le Front patriotique rwandais (FPR) de l’attentat contre l’avion du président Habyarimana, qui avait fait de l’ombre aux commémorations.

Si le déni est constitutif de tout génocide, celui des Tutsi a la particularité d’être remis en question de façon ouverte dans des forums respectables, au-delà des réseaux sociaux et des blogs complotistes.

Ce thème est au cœur du dernier essai de Linda Melvern, journaliste d’investigation britannique déjà auteure de deux ouvrages de référence sur le sujet. À l’aide d’arguments précis, de quantités de témoignages et de documents, Intent to Deceive (« La stratégie du mensonge ») expose la façon dont les négationnistes ont élaboré leur lecture alternative de l’histoire du génocide.

Campagne de désinformation à l’ONU

Le négationnisme du génocide a pour caractéristique d’avoir été construit dès les premiers jours des tueries. « Le coup de génie du gouvernement génocidaire a été d’utiliser son représentant au Conseil de sécurité pour répandre la théorie de la violence spontanée et incontrôlée et promouvoir la légitimité de ses actions sur une plateforme internationale. Les Nations unies ont fait partie intégrante de sa campagne de désinformation », souligne Linda Melvern. « Tout au long des trois mois du génocide, aucun autre représentant n’a demandé la mise à l’écart d’un diplomate qui persistait à légitimer les tueries », précise-t-elle.

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