Tous sur le banc des accusés

Publié le 19 juillet 2004 Lecture : 3 minutes.

Peut-on encore parler de chances de paix en Côte d’Ivoire ? Oui, semblent répondre à l’unisson les protagonistes d’une crise qui perdure depuis bientôt deux ans, les chefs d’État africains, l’ONU, l’Union africaine, tout comme la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) qui se sont donné rendez-vous pour de nouvelles négociations, le 29 juillet, à Accra. Non, tranche, pour sa part, l’International Crisis Group (icg). Du moins, si l’on s’en tient à l’intitulé du dernier rapport sur la Côte d’Ivoire de cette organisation non gouvernementale, dont le siège est à Bruxelles : « No peace in sight. » En français : « Pas de paix à l’horizon. »

Que dit donc l’ICG pour étayer son ivoiropessimisme ? Pas vraiment grand-chose que l’on ne sache déjà sur la tentative de coup d’État du 19 septembre 2002, qui s’est transformée en rébellion armée, laquelle a conduit à une partition de fait de la Côte d’Ivoire. À l’appui de sa thèse, l’ICG a produit quarante pages pour rappeler que « le manque de bonne foi et de volonté politique a largement compromis l’Accord de Linas-Marcoussis de janvier 2003. Toutes les questions cruciales, nationalité, éligibilité, et désarmement, soulevées en vue de restaurer la paix et l’unité nationale, de conduire le pays à l’élection présidentielle d’octobre 2005, sont actuellement figées. » « Aucun acteur politique n’a fait preuve d’une volonté manifeste de sortir de l’impasse, poursuit le rapport. Les partis de l’opposition ont quitté le gouvernement de réconciliation nationale. Les Forces nouvelles, émanation du groupe armé qui a ourdi la tentative de coup d’État du 19 septembre 2002, se sont repliées dans le Nord, refusent de désarmer avant les élections et flirtent même avec l’idée de sécession. »

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Pour comprendre les problèmes de la Côte d’Ivoire, il convient de mettre en exergue leur dimension économique, de prendre en considération le vieil adage qui commande de « suivre l’argent », souligne l’ICG, aréopage d’éminentes personnalités telles que l’ancien président finlandais Martti Ahtisaari, l’ex-commissaire européen, l’Italienne Emma Bonino, l’ancienne directrice Afrique du Pnud, la Libérienne Ellen Johnson Sirleaf, ou encore le financier et philanthrope américain George Soros. « L’impasse politique est exceptionnellement lucrative pour presque tout le monde, à l’exception des citoyens ordinaires. Des figures importantes du gouvernement sont accusées d’utiliser les deniers de l’État, surtout celles émanant d’institutions labyrinthes de la filière cacao, à des fins d’enrichissement personnel, pour l’achat d’armes et le recrutement de mercenaires. Les membres des Forces nouvelles sont, quant à eux, accusés de monopoliser dans le Nord certaines activités économiques, telles que le commerce du coton et des armes. »

L’ICG, qui compte actuellement quatre bureaux en Afrique (Le Caire, Dakar, Nairobi et Pretoria), en appelle donc aux uns et aux autres pour qu’ils prennent leurs responsabilités. Le gouvernement de réconciliation nationale « doit » privilégier l’Accord de Marcoussis, indispensable à la tenue du scrutin présidentiel, souligne le rapport. Les Forces nouvelles « doivent » revenir au gouvernement et rendre leurs armes sans condition préalable. Les formations politiques de l’opposition républicaine, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA, de l’ancien président Henri Konan Bédié) et le Rassemblement des républicains (RDR, de l’ex-Premier ministre Alassane Ouattara) « doivent » également reprendre leur place autour de la table du Conseil hebdomadaire des ministres, le premier nommé étant invité à jouer un rôle de « médiateur » entre le pouvoir et ses rebelles. Enfin, l’ICG encourage le président Laurent Gbagbo à réintégrer les trois ministres limogés en mai dernier et à leur permettre « d’exercer un contrôle total » sur leurs départements respectifs.

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