Lueurs d’espoir en Irak

Publié le 19 juin 2006 Lecture : 2 minutes.

La mort d’Abou Moussab al-Zarqaoui n’est pas un tournant majeur. Il sera remplacé et la violence va continuer en Irak. Mais il y a quelques signes politiques, de faibles lueurs d’espoir qui m’inspirent un certain optimisme.
Tout d’abord, la mort de Zarqaoui est peut-être le signe d’un changement d’attitude chez les sunnites radicaux. Zarqaoui a été probablement trahi par un proche de son organisation, peut-être même par l’un des siens. Son idéologie extrémiste et ses actions ont braqué les sunnites, y compris parmi ceux qui s’étaient ralliés à lui. Il y a, ensuite, le changement d’attitude de certains chiites radicaux. Plus important que l’élimination de Zarqaoui, la constitution du gouvernement à Bagdad a enfin été menée à bien avec un ministre sunnite à la Défense. Auparavant, le Premier ministre Nouri al-Maliki a annoncé la libération de 600 prisonniers, et bientôt 2 000. On a également appris que Maliki devrait présenter un plan national de réconciliation à la conférence organisée par la Ligue arabe à la fin de ce mois. Il devrait contenir des dispositions destinées à mettre un terme à la politique de « débaasification » dans sa forme actuelle, ainsi qu’une offre de réintégration adressée aux sunnites qui abandonnent l’insurrection. Pour Maliki, il s’agit, à travers cette initiative, de répondre aux revendications essentielles des sunnites et de faire participer au processus politique certains groupes modérés de l’insurrection.

Maliki commence également à s’occuper des milices. L’un de ses premiers actes en tant que Premier ministre a été de se rendre à Bassora, qui est aux mains des milices chiites, et de proclamer l’état d’urgence. Maliki devra aussi affronter le leader chiite Moqtada Sadr. Avec la mort de Zarqaoui, il bénéficie d’une plus grande popularité et dispose ainsi de meilleures cartes pour traiter avec ses adversaires. Pour lui, la priorité des priorités est le rétablissement de la sécurité, et il compte y parvenir en mobilisant davantage de troupes et en les concentrant à Bagdad. Excellente idée, à ceci près que la véritable sécurité exige bien plus que la puissance de feu. Maliki doit jeter les bases d’un nouvel ordre politique. Pour prendre une comparaison, imaginons qu’au lendemain de l’abolition de l’apartheid en Afrique du Sud, la majorité noire, en arrivant au pouvoir, ait décidé de démanteler tous les organes de l’État afrikaner, de dissoudre l’armée qui avait massacré les Noirs et de licencier tous les Blancs qui travaillaient dans l’administration. Le résultat aurait été le chaos, un État en déliquescence et, selon toute probabilité, une insurrection afrikaner. Mais elle n’a rien fait de tel. Au contraire, l’ANC a fait preuve d’un incroyable sens du pardon et donné aux Sud-Africains blancs l’assurance qu’ils occuperaient une place majeure dans la nouvelle Afrique du Sud. Du coup, le pays a bénéficié d’une plus grande stabilité politique et obtenu des succès économiques que nul n’aurait imaginés en 1994.

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Le contraste avec l’Irak est évident. Les États-Unis ont dissous l’armée irakienne et renvoyé 40 000 fonctionnaires lorsqu’ils ont occupé le pays, sur les conseils de certains – pas tous – leaders politiques chiites. On connaît le résultat. Depuis deux ans, nous essayons d’inverser le cours des choses. Mais pour bâtir un ordre politique stable, il faudra davantage qu’une armée irakienne ; il faudrait un Mandela irakien.

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