[Édito] Les municipales au Bénin, un test démocratique
Les élections communales et municipales, qui doivent se tenir le 17 mai prochain, seront cruciales. Elles vont en effet permettre, malgré les critiques dont Patrice Talon est la cible, d’assainir l’inextricable maquis politique béninois.
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François Soudan
Directeur de la rédaction de Jeune Afrique.
Publié le 19 mars 2020 Lecture : 2 minutes.
Le Bénin, lui aussi, est entré en guerre. À compter du 19 mars à minuit, onze mesures drastiques entérinées en Conseil des ministres, allant du quasi-blocage des frontières à la réquisition d’un millier de chambres d’hôtel aux fins de mise en quarantaine, en passant par l’interdiction de tout geste contaminant dans les lieux de culte, les bars et les transports en commun, entreront en vigueur.
Reste bien sûr à en vérifier le degré d’application concrète. Même si, à l’heure où ces lignes sont écrites, son pays ne compte que deux cas détectés de Covid-19, Patrice Talon a donc endossé la blouse de médecin chef en espérant que le sens de la discipline qu’il s’efforce d’insuffler à ses compatriotes depuis son arrivée au pouvoir produise ses effets.
Rendez-vous démocratique
Il est évidemment trop tôt pour savoir si la pandémie impactera ou non le rendez-vous démocratique très attendu des élections communales et municipales du 17 mai prochain.
Une étape supplémentaire dans le processus de rationalisation du paysage politique béninois
Après les législatives tendues d’avril 2019 et le dialogue politique qui, six mois plus tard, a agi comme un baume sur une plaie, ce scrutin devrait, si le contexte sanitaire le permet, marquer une étape supplémentaire dans le processus de rationalisation du paysage politique béninois.
Lors des dernières élections de ce type, en 2015, 34 listes de partis ou alliances de partis étaient en compétition, alors qu’à ce jour seules huit listes partisanes ont reçu leur récépissé provisoire de participation de la part de la Commission électorale nationale autonome (Cena), laquelle a clos, le 11 mars, le dépôt des dossiers de candidature.
Aller à l’élection en alliance n’est en effet désormais plus possible, et les formations politiques qui ne sont pas en mesure de présenter des candidats (titulaires et suppléants) dans chacun des 546 arrondissements du pays ne seront pas autorisés à compétir.
Seules les formations de réelle envergure nationale, disposant de militants dans toutes les communes du Bénin, sont logiquement passées au travers de ce tamis. L’Union progressiste, le Bloc républicain, les deux partis se réclamant de la Force cauris, le Parti du renouveau démocratique et quelques autres ont coché les cases de ce test de crédibilité.
Les regroupements de circonstance et les « particules » locaux, voire familiaux, qui poussent au Bénin comme les orchidées après la pluie – avant de connaître le même destin éphémère – sont tout aussi logiquement restés sur le carreau.
Un aggiornamento assumé
Pour l’opposition radicale, qui estime que les élections du 17 mai sont « une imposture » qu’il convient de boycotter, cet assainissement par le haut de l’inextricable maquis politique béninois constitue un recul démocratique impulsé par celui qu’elle n’hésite plus à qualifier de « dictateur autocratique ».
Nonobstant ses habituels dérapages linguistiques, on peut la comprendre, tant l’aggiornamento souhaité et assumé par Patrice Talon implique de privilégier les grands partis au détriment des cénacles d’agitateurs d’idées en mal de visibilité.
Trente ans après la Conférence nationale historique de 1990 qui instaura le « multipartisme intégral », réformer un système partisan qui a depuis longtemps montré ses limites au « Quartier Latin de l’Afrique » est une tâche pertinente et opportune, mais qui n’est pas sans risques.
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