Comment répondre au défi asiatique

Publié le 19 juin 2006 Lecture : 3 minutes.

Les termes de l’échange de la Chine se sont sensiblement détériorés depuis qu’elle s’est ouverte sur le monde. On estime que les prix de ses exportations ont baissé de 25 % environ par rapport aux prix de ses importations. Les exportations chinoises ont donc un impact positif pour le reste du monde.
Que la Chine ait apporté globalement un plus au reste du monde ne signifie pas qu’il en va de même pour chaque pays pris séparément. Plus les avantages comparatifs d’un pays se rapprochent de ceux de la Chine, plus il y a de chances que ce pays soit perdant (et vice versa). En pratique, les gagnants sont sans doute des producteurs de matières premières industrielles brutes, particulièrement de pétrole. Pour les pays à haut niveau de revenu, l’impact de l’Asie est ambigu : d’une part, le prix des biens et services qu’ils importent des pays en développement se trouve réduit (ce qui les avantage) ; d’autre part, le prix des matières premières importées augmente (ce qui les pénalise). Ces dernières années, la pénalisation l’a emporté sur l’avantage aux États-Unis et en Allemagne. En revanche, le Royaume-Uni est gagnant, dans une large mesure du fait de son autosuffisance énergétique.
Prenons maintenant le cas d’un pays pénalisé par l’ouverture de la Chine, au sens où les prix de ses importations augmentent par rapport à ceux de ses exportations. Le Mexique semble être un bon exemple. Celui-ci gagnerait-il à protéger ses producteurs contre les importations en provenance de Chine ? La réponse est négative. La perte subie est le résultat de l’évolution des prix sur les marchés mondiaux. Ce n’est pas en taxant les importations que le Mexique compensera cette perte, dès lors qu’il n’est pas en situation de monopole dans le commerce mondial. En règle générale, le protectionnisme impose un coût supplémentaire à l’économie. Il ne sert à rien de se lamenter sur une cause perdue.
S’agissant des pays à haut revenu, plus ils bénéficient de la baisse des prix mondiaux des produits à fort contenu salarial, plus marquée sera la redistribution de leurs revenus internes au détriment des salariés non qualifiés. L’avantage global qu’ils retirent s’accompagne ainsi d’un défi ponctuel.
Heureusement, celui-ci devrait être gérable. Les forces qui poussent à une égalisation globale des salaires par le fait du commerce international sont plutôt modérées. Toutefois, le résultat final risque bien d’être une concentration massive de l’emploi non qualifié dans la production de biens et services non marchands. Du moment que les contrôles sont maintenus en matière d’immigration de main-d’uvre non qualifiée, cela ne devrait pas tourner à la catastrophe. Il y a aussi d’autres mesures à considérer. Parmi elles, la réduction des prélèvements obligatoires sur les bas salaires ; la subvention des salaires des travailleurs non qualifiés ; des mesures de soutien à l’enseignement et à la formation professionnelle.
De fait, le monde est confronté à un bouleversement des conditions de l’offre. Mais le meilleur conseil qu’on puisse donner aux pays à haut revenu est de garder leur sang-froid. L’effet de redistribution interne des revenus dû au commerce international restera sans doute limité. Mais tenter, par des mesures protectionnistes, de reproduire dans la structure de leurs coûts de production l’avantage comparatif de l’Asie serait de la folie. Célébrons plutôt l’aide que le commerce international apporte aux peuples du monde pour surmonter la misère, pour empocher les fruits de leurs avantages comparatifs et pour faciliter les ajustements nécessaires.

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