Une banque tout-terrain

Lors de l’assemblée annuelle de l’institution financière panafricaine, les 14 et 15 mai, le président Donald Kaberuka a dévoilé les grandes lignes de sa stratégie pour les années à venir : aides tous azimuts en faveur des pays désireux de relancer leurs a

Publié le 19 mai 2008 Lecture : 3 minutes.

Première institution financière du continent, la Banque africaine de développement (BAD) a beaucoup changé depuis sa création, il y a quarante-cinq ans. Parce que, comme l’explique Donald Kaberuka, son actuel président, le monde de l’argent est devenu d’une extrême complexité. Et que le commerce n’a désormais plus de frontière.
Chaudement applaudi par les 1 492 délégués qui, les 14 et 15 mai à Maputo (Mozambique), ont participé à l’assemblée annuelle de la Banque, l’ancien ministre rwandais des Finances a dressé le bilan des réformes entreprises depuis son arrivée aux commandes, le 1er septembre 2005. Ouverte par le président mozambicain Armando Emilio Guebuza, dont le pays, après une longue guerre civile, est aujourd’hui en plein essor économique (une leçon pour tous les pays africains en situation de « postconflit »), l’assemblée a été un beau succès, rehaussé par la présence des présidents Thabo Mbeki (Afrique du Sud) et Denis Sassou Nguesso (Congo) et la participation active des grands argentiers de tous les pays membres (les ministres des Finances ou leurs représentants).

Cercle vertueux
Pour une fois, les réformes entreprises à tous les niveaux de la BAD (priorité aux « résultats », chasse à la corruption, etc.) n’ont été contestées par personne. Encouragé, le président Kaberuka a dévoilé les grandes lignes de sa stratégie à moyen terme (2008-2012), qui vise à créer « un cercle vertueux de la croissance économique » sur l’ensemble du continent. Indiscutablement, il a les moyens de ses ambitions : une assise financière solide (68 milliards de dollars), une crédibilité qui lui permet d’emprunter sans risque sur tous les marchés des capitaux, la confiance des bailleurs de fonds bilatéraux (Europe, Asie, Amérique) et multilatéraux (les institutions multilatérales), mais aussi des ressources suffisantes pour financer autant de projets qu’elle le souhaite.
Car la Banque entend jouer sur tous les tableaux. Normal : en matière de développement, tout est lié. On ne peut traiter l’eau en négligeant l’assainissement. Encourager la production sans réaliser les infrastructures nécessaires à son écoulement. Promouvoir l’emploi et la formation sans se préoccuper de la santé et de l’éducation. À Maputo, les délégués ont donc entériné la poursuite et le renforcement d’une série d’opérations en cours, mais aussi quelques innovations.

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Négligences
Et d’abord en ce qui concerne la crise alimentaire qui frappe actuellement une vingtaine de pays. « L’agriculture africaine a souffert de nombreuses négligences », a expliqué Kaberuka. Les paysans n’ont pas été payés à la hauteur de leur travail, les autorités préférant subventionner les citadins en leur offrant des produits agricoles à prix réduits. Résultat : nombre de paysans ont abandonné leurs champs pour rejoindre les villes, provoquant le déclin de la production alimentaire et le recours massif aux importations. Le continent achète aujourd’hui à l’étranger 26 millions de tonnes de riz, soit plus de 50 % de sa consommation. « Cette année, le Vietnam exportera davantage de café que tous les pays africains réunis », constate avec amertume le président de la Banque.
Que faire ? Les dons alimentaires ne sont pas, selon lui, la solution. À l’inverse, il a lancé un programme d’aide financière à l’intention des pays désireux de relancer leurs activités agricoles, en les aidant à acheter des engrais. Simultanément, il a renforcé les autres mécanismes spéciaux : facilités pour l’accès à l’eau, pour l’assainissement rural et pour les pays fragiles (650 millions de dollars leur seront attribués, sur trois ans), aide spéciale pour les pays « stressés » (qui ont du mal à boucler leur budget en raison de la réduction des taxes sur les produits alimentaires)Â
Ces instruments financiers s’ajoutent aux ressources habituelles destinées aux infrastructures, au secteur privé, à la microfinance, aux allègements de la dette extérieure, à l’assistance technique, etc. « Personne ne sera oublié », a promis un Donald Kaberuka décidément très à l’aise.

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