Décès de Manu Dibango : le Cameroun pleure l’un de ses plus grands artistes
Les hommages se multiplient, au Cameroun, après l’annonce de la mort du saxophoniste. Le pays tout entier pleure l’un de ses plus célèbres enfants, emporté par le coronavirus.
Des trombes d’eau et une nouvelle que tous redoutaient depuis qu’une folle rumeur avait donné Manu Dibango pour mort, quelques jours jours plus tôt. En ce matin du 24 mars, la famille de l’artiste a finalement annoncé son décès et le réveil est rude pour nombre de Camerounais. L’infatigable légende de la musique africaine, dont on avait fini par oublier qu’elle n’était pas éternelle tant ses succès avaient traversé les décennies, a succombé à l’épidémie de coronavirus.
Dans les heures qui ont suivi, les hommages se sont succédés. « Manu aura mouillé le boubou jusqu’au bout, lance le journaliste Steve Tchiega Eke Mbengue, avant de donner le coup d’envoi d’une émission spéciale consacrée à l’illustre disparu sur les ondes de la télévision nationale. C’est triste, mais on reste debout. »
Un modèle pour les artistes
Une peine partagée par l’ensemble des fans de celui qu’on surnommait « Papa Manu ». « Je n’ai pas de mots pour décrire ce que je ressens. Il était comme un membre de ma famille », soupire Vincent, en ravalant son émotion. Un cadre photo à la main, il nous reçoit dans son salon, à son domicile de Yaoundé, exhibant fièrement ses vieux vinyles achetés lors de ses séjours en France. Il en est un qu’il aime particulièrement : c’est l’album de la Coupe d’Afrique des nations 1972. Sur la face B, le titre « Soul Makossa », qui révéla l’artiste au monde.
Ce sens du partage m’a toujours marqué. Il est resté musicien jusqu’au bout
Au ministère des Arts et de la culture, le portrait de Manu Dibango, tout sourire, saxophone entre les mains, continue d’accueillir les visiteurs. Pour nombre d’artistes, c’est un « modèle » qui s’en est allé. Le bassiste Serge Maboma, du groupe Macase, avec lequel Manu Dibango s’était produit à plusieurs reprises sur des scènes au Cameroun, se souvient « d’un artiste rigoureux, qui savait faire confiance aux jeunes ».
« Ce satané virus nous a enlevé ce que la culture africaine avait de mieux », a commenté la chanteuse camerounaise Charlotte Dipanda sur son compte Facebook. Le musicien Sam Fan Thomas, qui est par ailleurs le président du conseil d’administration de la Société nationale de l’art camerounais (Sonacam), se souvient, lui, de son « son humilité et de sa persévérance ». « Lorsque je faisais l’Olympia, Manu Dibango était venu donner un dernier conseil à mes choristes afin qu’ils puissent s’accorder sur scène. Ce sens du partage m’a toujours marqué. Il est resté musicien jusqu’au bout. »
Une « renaissance »
Hors du milieu artistique, l’émotion est également forte. Le membres du gouvernement, réunis le 24 mars pour discuter des mesures à prendre pour lutter contre la pandémie de Covid-19, ont observé une minute de silence. L’opposant Akere Muna, l’ancien footballeur international Samuel Eto’o, ou encore le communicant Ferdinand Nana Payong, qui avait organisé l’année dernière plusieurs événements pour rendre hommage à ses 60 ans de carrière, ont tous exprimé leur tristesse. « C’est sa mort, mais c’est aussi sa renaissance, conclut le professeur Dou Kaya. Manu Dibango, ce sont des poèmes que nous allons réciter, des chansons que nous allons dire. »
La famille du défunt a indiqué qu’un hommage plus officiel lui serait rendu dès que les circonstances le permettraient. En attendant, le Cameroun et le monde de la musique africaine pleurent la disparition de l’un de leurs plus grands artistes.
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