Bernardin Gantin
Premier archevêque noir du continent, le prélat béninois a connu pas moins de six papes. Il laisse une profonde empreinte sur cinquante ans d’histoire de l’Église catholique en Afrique.
Avec la mort, le 13 mai, à Paris, à l’âge de 86 ans, du cardinal béninois Bernardin Gantin, une page de l’histoire de l’Église catholique romaine en Afrique s’est tournée. À plus d’un titre, le prélat béninois, qui a connu six papes, reste l’un des pionniers de cette Église africaine naissante à l’aube des indépendances. Nommé évêque auxiliaire de Cotonou en 1956 – il a alors 34 ans -, il devient, quatre ans plus tard, le premier archevêque noir du continent. Et le premier Africain à entrer, dès 1971, à la très fermée Curie romaine, au Vatican.
Né en mai 1922 à Toffo, dans le sud de l’actuel Bénin, le jeune Gantin, formé au petit séminaire de Ouidah, est ordonné prêtre en 1951. Deux ans après, il se rend à Rome pour étudier la théologie et le droit canon. En février 1957, il y est consacré évêque, avant d’être porté à la tête de l’archevêché de Cotonou en janvier 1960. À la fois témoin et acteur privilégié de la vie du Saint-Siège, il participe à tous les débats amorcés au sein de l’Église catholique romaine à partir du concile Vatican II (1962-1965).
Le destin de Gantin change en 1971 lorsque le pape Paul VI l’appelle à Rome, où il le nomme d’abord secrétaire adjoint de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples puis secrétaire, deux ans plus tard. Une première pour un Africain. Son ascension dans les institutions du Saint-Siège s’accélère : vice-président de la Commission pontificale Justice et Paix en 1976, puis président en 1977, l’année de sa création comme cardinal. En 1978, Jean-Paul Ier le nomme préfet de la Congrégation pour les évêques. Il sera également président de la Commission pontificale pour l’Amérique latine, doyen du Sacré CollègeÂÂ En raison de son âge avancé, il démissionne de ses fonctions en 1998. Puis regagne le Bénin en 2002.
Tout au long de sa carrière, le cardinal Gantin, qui fut très proche de Jean-Paul II, s’est considéré comme un missionnaire. Le missionnaire d’une Église où l’Afrique est partie prenante. « Je ne suis pas cardinal pour m’en vanter ! disait-il. Nous sommes entrés dans l’universalité, dans la catholicité de l’Église : c’est la chose la plus importante. » Dans le cadre de ses fonctions, il a eu à gérer des dossiers aussi difficiles que l’excommunication de Mgr Marcel Lefebvre, le chef de file des traditionalistes, ou la mise à l’écart du « trop militant » Mgr Jacques Gaillot. Ces décisions annoncées au nom de sa hiérarchie lui ont valu, rapporte un prêtre congolais qui l’a connu à l’époque, « de nombreux messages d’injures racistes ». Par ailleurs, il dénoncera avec constance le comportement de certains évêques, plus attachés à leur carrière qu’aux valeurs de l’Église.
Jusqu’à son départ du Vatican, où, selon le prêtre congolais, sa présence a longtemps symbolisé « une reconnaissance de l’Afrique, de ses capacités et de ses valeurs », le cardinal Bernardin Gantin est resté loin des intrigues. Il est demeuré droit, intègre, fidèle à l’Église, simple, et a toujours refusé de s’attacher aux avantages matériels liés à ses différentes charges.
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