Tunisair se serre la ceinture

Depuis trois ans, la compagnie tunisienne accumule les déficits. La direction met en route un plan de restructuration draconien.

Publié le 19 mai 2003 Lecture : 3 minutes.

Le ralentissement des flux touristiques, consécutif aux attentats du 11 septembre 2001 et à la guerre en Irak de mars-avril derniers, a provoqué une baisse du trafic aérien mondial. Tunisair, la compagnie nationale tunisienne, qui réalise une grande partie de ses activités avec l’Europe et le Moyen-Orient, a enregistré, pour sa part, au cours de l’exercice écoulé, une baisse record de ses recettes, estimée à 23 millions de dinars (16 millions d’euros), et cela malgré l’augmentation de ses tarifs.
Après avoir réalisé, entre 1988 et 1998, 38 millions de dinars de bénéfices par an en moyenne, Tunisair enchaîne, désormais, les déficits : 34 millions de dinars en 2000, 45 millions en 2001 et 31 millions en 2002.
Ces pertes résultent de la baisse du nombre des voyageurs, plafonné aujourd’hui à 3,6 millions par an (- 22 % en 2001 et – 12,5 % en 2002) et d’une sous-exploitation de la flotte, qui compte une trentaine d’appareils, dont la moyenne d’âge ne dépasse guère cinq ans (huit heures de vol par avion et par jour contre dix à douze heures pour les autres compagnies). Tunisair emploie près de 7 300 agents (soit plus de 240 personnes par avion, contre une norme internationale de 100). La majorité de ses agents perçoit dix-huit mois de salaire pour onze mois de travail. Ces charges ont alourdi les coûts d’exploitation et réduit les marges de bénéfice de la compagnie. Des investissements réalisés au cours des dernières années, notamment pour l’achat de nouveaux appareils, ont aggravé ses pertes et gonflé ses dettes, qui se sont élevées, à la fin de 2002, à 625 millions de dinars (contre 190 millions cinq ans auparavant). Conséquence : l’action de l’entreprise à la Bourse de Tunis est cotée, aujourd’hui, à 7 dinars, soit trois fois moins que lors de son introduction, en juillet 1995 (23,5 dinars). Pis : les actionnaires privés, qui détiennent 20 % du capital de l’entreprise, n’ont reçu aucun dividende depuis trois ans.
Pour tenter de redresser la situation, Tunisair a arrêté, dès 2001, un vaste plan de restructuration, qui a fait l’objet de longues négociations entre les représentants syndicaux, les hauts cadres de l’entreprise et le gouvernement. Ses dernières semaines, un consensus a pu enfin être dégagé sur les concessions – ou les sacrifices – qui devraient être faits par chacune de ces parties. Le scénario d’un éventuelle privatisation de la compagnie a finalement été abandonné.
Le plan de restructuration prévoit ainsi une réduction des effectifs – les responsables syndicaux parlent de 1 000 à 2 000 licenciements économiques -, une suppression ou une diminution de certaines primes attribuées au personnel, une compression des dépenses, une réduction des charges d’exploitation, une gestion optimale de la flotte, une stratégie commerciale plus agressive – dont l’étude a été confiée à un cabinet allemand -, une révision du réseau de la compagnie, avec notamment la suppression de certaines lignes non rentables, et une alliance stratégique avec un groupement commercial étranger. Des discussions sont en cours pour une éventuelle adhésion à Sky Team, qui réunit Air France et Delta. Au menu également : l’achèvement de la filialisation du service catering (restauration), qui a été cédé à une nouvelle société, où Tunisair conserve 45 % du capital, et l’externalisation de certaines activités, comme la formation et la maintenance.
Pour réduire son déficit prévisionnel pour l’exercice écoulé, qui était évalué à plus de 60 millions de dinars, Tunisair a dû vendre un Airbus A-300-B4 pour un montant de 6,1 millions de dinars, louer deux B-737-200, céder une partie de sa participation au capital de l’Union internationale de banques (UIB, privatisée en 2002), et réduire ses charges d’exploitation de 22 millions de dinars. Elle a également immobilisé une partie de sa flotte, mis fin à certaines assurances et mis en congé une partie de son personnel. D’autres mesures, plus draconiennes, pourraient être prises dans les semaines à venir.
La compagnie, qui partage le marché national avec sa filiale Tuninter et deux compagnies privées charters, tout récemment converties aux vols réguliers, Nouvel Air d’Aziz Miled, et Karthago Airlines de Belhassen Trabelsi, espère maintenir son déficit pour l’année en cours dans les limites de 30 millions de dinars et renouer avec les bénéfices à partir de 2004 ou 2005. Mission impossible ? Non, mais il faut continuer à se serrer la ceinture.

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