[Chronique] Abdelaziz Bouteflika, champion du monde du confinement
Une année après sa démission de la présidence algérienne, Abdelaziz Bouteflika est plus isolé que le plus scrupuleux des confinés.
Le mouvement du Hirak a eu bien raison de célébrer, le 22 février dernier, le premier anniversaire du soulèvement de la société civile algérienne. Car il va être difficile de souffler dignement la première bougie du « dégagement » d’Abdelaziz Bouteflika, le 2 avril, douze mois après la notification officielle de la démission du président de la République d’alors au Conseil constitutionnel. En pleine crise du Covid-19, la vague populaire toujours résiliente est prise au piège de mesures de distanciation sociale encadrées par une répression sans faille.
En réalité, le Hirak n’est ni satisfait du jeu de bonneteau politique qui a mené Abdelmadjid Tebboune à la tête du régime, ni obsédé par sa rancœur envers « Boutef ». Si les oreilles de ce dernier ont trop sifflé quand il était au pouvoir, il a sans doute l’impression qu’on parle désormais trop peu de lui. Il n’aura pas attendu la pandémie mondiale du coronavirus pour être isolé.
Solitude et mutisme
Comme à l’accoutumée, lorsqu’un « prince » choit, une bonne partie des thuriféraires pratique une débandade aussi soudaine qu’efficace. Quant aux affidés fidèles dans l’épreuve, ils sont, pour un bon nombre, interdits de visite à l’ancien président pour cause d’incarcération longue durée, notamment les deux anciens patrons du renseignement Mohamed Lamine Mediène et Athmane Tartag, les deux anciens Premiers ministres Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal et même Saïd Bouteflika, frère et ex-puissant conseiller. Si certains ne sont pas empêchés de visite par la porte d’un cachot, c’est qu’ils sont en cavale, comme l’ancien ministre Abdeslam Bouchouareb, condamné par contumace.
À 83 ans, déjà muré dans les séquelles de son accident vasculaire cérébral de 2013, Abdelaziz Bouteflika est donc retranché dans une solitude qui n’a d’égal que son mutisme public, depuis un an qu’on ne lui témoigne plus la déférence due à un chef d’État.
Dans la résidence médicalisée de Zeralda, à 20 kilomètres d’Alger, n’échappent aux règles de la distanciation sociale que les derniers membres de la famille épargnés par la Justice – les frère et sœur Nacer et Zhor – et les membres de l’équipe médicale. Abdelaziz Bouteflika coule une aphasie recluse, regardant approcher la vague des contaminations au coronavirus et s’éloigner la perspective d’une comparution devant la justice.
Une mise en accusation que certains continuent tout de même d’appeler de leurs vœux, ne serait-ce que pour des raisons symboliques. Pour l’heure, le troisième pays africain le plus touché par la pandémie a d’autres Covid à fouetter…
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