L’exemple

Publié le 19 mai 2003 Lecture : 2 minutes.

Nous le voyons bien : il n’y a plus, ni au Moyen-Orient ni au Maghreb, de pays ayant la dimension politique et la stature morale qui lui permettent de prétendre à un rôle régional ou international.
Dieu sait si cette partie du monde en a particulièrement besoin, elle qui, à l’inverse, regorge de dictateurs au petit pied, de dirigeants ayant pour deuxième nature de ne pas faire ce qu’ils disent et de ne pas dire ce qu’ils font…
Fort heureusement pour lui, secoué de crises, marginalisé et malheureux à bien des égards, le continent africain dispose, lui, d’un grand pays qui a su garder aura et influence : la République d’Afrique du Sud.
Située à un bout de l’Afrique, dernière à s’être libérée (en 1994) d’une domination à nulle autre pareille, la République sud-africaine estime avoir une dette vis-à-vis du reste du continent (et du monde) qui l’ont aidée à desserrer l’étreinte du système qui l’opprimait. Mais, appréhendant de se laisser distraire de ses immenses problèmes intérieurs, elle a hésité un temps à intervenir hors de ses frontières.
Et, lorsqu’elle s’est résolue à le faire, au lieu de saupoudrer ici et là, d’être présente un peu partout, elle a eu la sagesse de concentrer les quelques moyens humains, financiers et militaires dont elle pouvait doter sa diplomatie sur la partie du continent qu’elle espérait pouvoir aider : le Mozambique, le Burundi, l’Angola, la République démocratique du Congo, le Zimbabwe
Même lorsque, dans certains cas, cela déplaisait à Washington ou à Londres, elle a manifesté reconnaissance et fidélité aux pays qui l’ont reconnue et aidée avant qu’elle ne soit libérée de l’apartheid : Algérie, Libye, Sénégal, Cuba, Palestine.
Elle a donné refuge à des milliers d’Africains, avec beaucoup de libéralité et de générosité.
Elle n’a pas « lié » son aide, ni fait de la recherche de marchés sa priorité. Elle n’a pas joué des coudes, ni recherché la rivalité avec les plus grands.
Mieux que d’autres plus expérimentés, et qui se donnent volontiers en exemple de désintéressement, elle a compris que la suprême habileté est de ne pas privilégier l’habileté. D’instinct elle a su qu’elle servait mieux ses intérêts supérieurs en se préoccupant moins de ses intérêts subalternes.
Avec, à sa tête, d’abord le grand Nelson Mandela, homme de convictions, puis Thabo Mbeki, le pragmatique, elle a défendu l’ONU et la morale internationale, cherché à ce que la paix soit préservée ou restaurée.
La diplomatie sud-africaine a certes commis des erreurs, rencontré des déboires, montré ses limites. Mais on ne lui connaît pas de scandale, pas de dérapage ni d’abus.
On ne peut donc qu’être fier de voir un pays de taille moyenne par sa population, venu à la souveraineté et aux relations internationales il y a moins de dix ans, donner un si bel exemple de rectitude morale. Et que ce pays se trouve sur ce continent africain par ailleurs si décrié.
Pourvu que cela dure et que l’Afrique ait longtemps encore cet exemple à donner au reste du monde.

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