Le sida, une urgence pour le G8 ?

Publié le 19 mai 2003 Lecture : 3 minutes.

Le monde doit faire face à une progression quasi hors de contrôle du sida. Les données épidémiologiques sont à un tel point catastrophiques qu’un sursaut massif et global s’impose, sans quoi c’est toute une partie de l’humanité qui disparaîtra. Aujourd’hui, plus de 42 millions de personnes vivent avec le VIH, le virus du sida. L’Onusida estime qu’en 2002 environ 5 millions de personnes ont contracté le VIH. Trois millions en sont mortes. L’Afrique est le continent le plus touché, avec une épidémie en croissance et un développement visible de l’impact de la maladie sur les économies et sur les sociétés des pays africains (tel que la diminution du nombre d’enseignants, d’agriculteurs, de professionnels de santé, mais également l’augmentation du nombre d’orphelins du sida, la baisse de fréquentation des écoles pour les enfants affectés par le VIH, etc.). L’Europe orientale, l’Asie du Sud et du Sud-Est connaissent dans le même temps une très forte propagation du virus.
Au-delà de ces chiffres effrayants, les malades, leurs familles et les soignants, médecins et infirmières, expriment de plus en plus ouvertement un sentiment de révolte. En effet, il existe des traitements pour soigner les malades. Ces traitements, les fameuses multithérapies, ne font pas guérir du sida, mais permettent de ralentir la progression de l’infection. Dans les pays développés où ils ont été distribués, la mortalité a pu baisser de plus de 70 %. Cet espoir, il est possible de l’offrir aux malades des pays les plus pauvres. Pourtant, ce n’est pas une réalité.
Pour expliquer ce déni d’accès aux traitements, il faut bien sûr revenir sur les échecs des politiques de développement menées depuis de nombreuses années. L’explosion de la dette extérieure et les politiques d’ajustement structurel, tout comme la privatisation de certains services de santé, ont fait le lit de l’épidémie. Les pays en développement, souvent sur l’injonction des organismes internationaux de coopération économique, ont refusé d’inclure l’accès aux traitements dans leurs politiques nationales de lutte contre le sida. Et pour ceux qui le souhaitaient, il aura fallu se battre contre les industries pharmaceutiques et leur refus de rendre les médicaments accessibles à des populations très pauvres.
Surtout, les politiques jusque-là mises en oeuvre par les pays les plus riches de la planète ne correspondent pas à la réalité des besoins. Malgré de récurrentes belles déclarations sur la nécessaire solidarité avec les malades des pays pauvres, les actes ne suivent pas. Le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et la malaria, qui devait enfin apporter la solution tant attendue, prévoit de prendre en charge les traitements de 500 000 malades seulement d’ici à cinq ans, lorsque 10 millions de séropositifs en ont besoin dès maintenant. Aujourd’hui, le sida impose une autre solidarité internationale.
Les logiques de soutien aux pays pauvres doivent s’inverser. Les politiques d’aide doivent s’inscrire dans le long terme ; il faut aussi planifier l’intégration de la lutte contre le sida dans les programmes de développement, tout en favorisant l’appropriation de ce combat par les populations locales et notamment par les populations elles-mêmes touchées par l’épidémie, qui sont souvent les mieux placées pour évaluer leurs besoins. Il faut également permettre aux communautés d’oeuvrer pour le respect de leurs droits afin d’obtenir de leurs gouvernements les stratégies de lutte qui les protègent et favorisent leur accès aux soins et aux traitements.
À l’initiative de nombreuses associations de lutte contre le sida ou de développement, la campagne
Sida urgence G8 entend rappeler aux chefs des plus grandes puissances mondiales, au premier rang desquels M. Jacques Chirac, qu’il convient d’obtenir du G8 un engagement clair visant à permettre l’accès aux traitements et aux outils de prévention pour tous ; cela doit se faire dans un esprit de promotion d’un accès aux soins gratuits pour les pathologies chroniques tout en favorisant la production et le commerce des produits de santé génériques dans les pays en développement. Enfin, la France risque de perdre son leadership à force de ne pas tenir ses propres promesses. Elle doit donc s’engager plus fortement sur le plan financier.
Elle a raisonnablement les moyens de consacrer 1 milliard d’euros par an à l’accès aux traitements.
Durant la réunion du G8, la France doit montrer l’exemple.

* Au nom d’Ensemble contre le sida-Sidaction et des autres associations de la campagne Sida urgence G8
(Act Up-Paris, Crid, France libertés, GRDR, Médecins du monde, MFPF, Solidarité sida) www.sida-urgenceg8.org

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