Dix-sept miraculés

Le 20 février, trente et un touristes européens étaient pris en otages par des islamistes armés. Un premier groupe a été libéré par les forces spéciales le 14 mai.

Publié le 19 mai 2003 Lecture : 3 minutes.

L’affaire des trente et un touristes européens disparus dans le Grand Sud algérien depuis le 20 février a connu un début d’épilogue avec la libération, le 14 mai, de dix-sept otages (dix Autrichiens, six Allemands et un Suédois) après l’assaut donné par les unités spéciales de l’armée algérienne contre le repaire de leurs ravisseurs, à Amguid, au nord de Tamanrasset. Cette intervention a également permis la neutralisation de quatre preneurs d’otages, identifiés comme membres du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC, de Hassan Hattab, une organisation affiliée à el-Qaïda).
L’opération a nécessité, selon le témoignage de certains otages libérés, la mobilisation de troupes aéroportées et de moyens aériens. L’effet de surprise et le bombardement par hélicoptère ont permis d’éloigner les ravisseurs de leurs otages, et de sauver la vie de ces derniers.
Nul triomphalisme cependant chez les militaires algériens après le succès d’une opération menée « sans aucune assistance étrangère », dixit Abdelaziz Belkhadem, le ministre des Affaires étrangères. « Il reste encore quatorze otages détenus par un second groupe dans la montagne de Tamelrik, précise un officier de la sixième région militaire. Leur libération est plus compliquée. Deux facteurs jouent contre nous : le temps, il faut intervenir avant que les ravisseurs apprennent l’élimination de leurs acolytes, et la configuration du terrain, moins propice à ce genre d’opération qu’Amguid. »
Qui sont les ravisseurs ? Il s’agit d’un groupe placé sous la direction de Mokhtar Belmokhtar, un émir du GSPC sorti de l’anonymat quand la CIA et le Pentagone avaient fait état, en décembre 2000, de menaces d’attentat par ce groupe contre le rallye Paris-Dakar transitant par le Niger. Le Grand Sud algérien n’est pourtant pas réputé pour être le terrain de prédilection des groupes armés. Issus des GIA, Belmokhtar avait fait acte d’allégeance à Hassan Hattab quand ce dernier a créé le GSPC, en 1998. Coupé de sa direction, basée en Kabylie, il a vécu d’expédients et a très vite versé dans le grand banditisme et la contrebande, rackettant, au passage, les caravanes de Touaregs et autres transhumants. Quand l’information sur la disparition des touristes a été rendue publique, le 1er mars, peu d’Algériens leur ont accordé des chances de survie en cas de rapt par Belmokhtar. « Il n’est pas du genre à s’embarrasser de prisonniers », raconte un diplomate accrédité au Mali et qui connaît bien cette partie du Sahara située à cheval entre l’Algérie, le Mali, le Niger et la Libye. « Il ne faut pas oublier que c’est un dissident des GIA, connus pour leur sanglante épopée. »
Pourquoi les otages ont-ils été épargnés, sinon pour exiger une rançon ? Les autorités algériennes ont démenti toutes les informations sur d’éventuelles négociations avec les preneurs d’otages. Au début de mai, Larbi Belkheir, directeur de cabinet du président Abdelaziz Bouteflika, a assuré à J.A.I. qu’il ne dispose d’aucune information si ce n’est que les otages sont vivants. Tous les responsables algériens, civils ou militaires, répondent de la même manière quand on aborde avec eux l’affaire des touristes. « Laissez tomber, il ne s’agit pas de dissimuler de l’information, mais de sauver des vies humaines. Moins on en parlera, plus ils auront des chances de s’en sortir. » La discrétion a payé pour dix-sept d’entre eux. En sera-t-il de même pour les quatorze autres ?

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