Crime et préjugé
Maryse Condé raconte l’histoire d’une femme qui lui ressemble. Entre satire sociale et enquête policière.
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Rosélie Thibaudin… Un nom banal d’Antillaise ordinaire pour incarner une jeune femme qui vit dans l’ombre de l’homme qu’elle aime. On la découvre dans le dernier roman de Maryse Condé, Histoire de la femme cannibale, avec l’impression de pénétrer par effraction dans sa vie. Cette Rosélie est une écorchée vive qui se dissimule comme elle cache les tableaux qu’elle peint, mystérieux exutoires à ses obsessions. Née en Guadeloupe, arrivée par le hasard d’un amour malheureux en Afrique du Sud, Rosélie a rencontré le brillant Stephen, un Anglais, professeur de littérature à l’université du Cap. Ont suivi vingt ans d’une vie aisée dans l’ombre d’un homme vénéré. Ce même homme que l’on découvrira assassiné dans une rue du Cap. Crime de rôdeur ? L’inspecteur Lewis Sithole n’en est pas convaincu…
L’Histoire de la femme cannibale est bâti comme un roman policier. On y retrouve l’ambiance inquiétante de Célanire cou-coupé, roman publié en 2001.
L’auteur se livre avec une délectation presque sadique à la démythification de ses personnages. Elle évoque, davantage qu’elle ne révèle, leur face obscure, leurs défauts, leurs mensonges.
Ce livre est aussi un roman sur le racisme et la ségrégation. La femme noire qui vit avec un homme blanc dérange une société sud-africaine encore empêtrée dans ses préjugés. Rosélie perçoit le mépris qui l’entoure et rumine les affronts que Stephen s’obstine à traiter avec désinvolture.
Maryse Condé en parle en connaissance de cause : sa Rosélie lui ressemble, elle qui est aussi mariée à un Blanc, venue de Guadeloupe à New York, où elle enseigne la littérature. Peut-être est-ce pour cette raison que le « je » supplante parfois le « elle » narratif. Un roman à dévorer d’une traite.
Histoire de la femme cannibale, Maryse Condé, éditions Mercure de France, 317 pp., 18 euros.
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