Apprendre à mieux faire

Publié le 19 avril 2004 Lecture : 3 minutes.

Ces dernières années, en Afrique, les coûts élevés des traitements(les multithérapies), l’insuffisancede ressources humaines formées et motivées et les atermoiements
bureaucratiques des structures nationales et internationales de lutte contre le sida ont pour conséquence un nombre croissant de malades qui meurent du sida : 8 500 par jour dans le monde. Trois ans après le lancement par les Nations unies d’une offensive globale contre l’épidémie de sida etmalgré la création du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme, force est de constater la lenteur des progrès.

La mobilisation financière est essentielle, car « elle reste le nerf de la guerre contre le sida » répète sans cesse la vice-présidente de Sidaction, Line Renaud. Pourtant l’on se rend compte sur le terrain que l’afflux d’argent n’engendre pas toujours une multiplication des offres de soins et de prévention. Dans plusieurs pays, soutenus à la fois par le Fonds mondial et les programmes multisectoriels (MAP) de la Banque Mondiale, les rythmes d’utilisation des fonds ne sont pas ceux prévus, les files actives de malades
sous traitements n’augmentent pas aussi vite qu’il le faudrait, les opérateurs locaux n’ont pas toujours les informations nécessaires pour postuler à ces financements, etc. Plusieurs raisons à cela :

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La première raison est que le nombre de professionnels formés, et notamment de médecins et de personnels paramédicaux, est encore trop insuffisant. Au Burundi, combien de médecins prescripteurs pour traiter les 80 000 malades qui en ont besoin maintenant ? Une dizaine, peut-être quinze. Au Burkina Faso, la situation est encore plus dramatique et les
praticiens engagés sont absolument débordés ; les files d’attentes de malades souhaitant débuter une multithérapie s’allongent devant l’hôpital national Sanou-Soro de Bobo-Dioulasso, le Centre de traitement ambulatoire de la Croix-Rouge française, l’hôpital
pédiatrique Charles-de-Gaulle ou encore le Centre Oasis de l’Association africaine de solidarité (AAS) à Ouagadougou. Les programmes de formation doivent donc être prioritaires, comme ils le sont depuis plusieurs années à Sidaction, sous l’impulsion de
chercheurs, de soignants et d’associations qui ont cru avant d’autres à l’accès aux soins.
La deuxième raison à avancer devant la lenteur de consommation des financements disponibles est le niveau d’engagement des professionnels. Il s’agit là d’un tabou. Pourtant, n’est-il pas temps de s’interroger ? Est-il raisonnable qu’un médecin hospitalier malien ne gagne que 150 euros par mois (100 000 F CFA) ? Un gastro-entérologue
avec vingt ans d’expérience 230 euros au Cameroun ? Un pédiatre, professeur d’université, environ 80 euros par mois au Burundi ? Soyons certains que les malades pourraient tous compter sur un plus grand nombre de soignants si ceux-ci savaient que leur investissement dans des soins complexes mais passionnants leur permettrait de gagner leur vie sans avoir
besoin de courir de l’hôpital vers les cliniques privées. Il s’agit là également d’une reconnaissance professionnelle indispensable à laquelle Sidaction prend sa part, en acceptant par exemple de prendre en charge des salaires de soignants.

Toutefois, il serait malhonnête de ne pas reconnaître que des progrès ont été réalisés ; et c’est de ces réalisations que nous devons justement apprendre à mieux lutter contre le sida. Aujourd’hui pourtant, beaucoup refusent d’oser et d’expérimenter de nouvelles façons de coopérer, tant parmi les autorités nationales de lutte contre le sida qu’au sein des agences de coopération du Nord. Nous pensons qu’il faut privilégier partout où c’est possible les expériences de terrain qui ont fait leurs preuves (comme l’action du Centre de soins, d’animations et de conseil Cesac à Bamako), les échanges d’expériences entre différentes structures du Sud (plutôt que de vouloir à tout prix reproduire un accès aux soins centré uniquement sur l’hôpital public, hôpital fort cher par ailleurs) et enfin les collaborations entre les structures publiques de santé, les centres communautaires gérés par des associations ou des groupements religieux.
Depuis 1994, Sidaction soutient et amplifie la lutte contre le sida en Afrique. Le week-end prochain, du 23 au 25 avril, c’est en téléphonant au 116 ou en se connectant à www.sidaction.org que chacun peut faire un don pour l’Afrique.

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