De l’or à la pelle

Secteur clé de l’économie, l’exploitation aurifère n’a qu’une durée de vie limitée En attendant la découverte de nouvelles réserves.

Publié le 19 mars 2007 Lecture : 4 minutes.

Avec une contribution de 50 % aux recettes d’exportation, soit quelque 300 milliards de F CFA (450 millions d’euros), et de 10 % à la formation du produit intérieur brut (PIB), la filière or reste un des secteurs clés de l’économie malienne et le premier poste d’exportation du pays, devant le coton et l’élevage. Désormais troisième producteur africain, derrière l’Afrique du Sud et le Ghana, le Mali pourra-t-il conserver encore longtemps cette place ? Certes, après être tombée à 41,58 tonnes en 2004, la production est repartie à la hausse : 50 tonnes en 2005 et 53 tonnes en 2006. Elle devrait atteindre 60 tonnes cette année. Mais rien n’est sûr au-delà de 2012, puisqu’une partie des réserves jusqu’ici mise en valeur devrait être épuisée. Sauf à découvrir de nouveaux gisements. En attendant, plus de 95 % du total de la production aurifère du Mali est assuré par sept mines – Morila, Sadiola, Yatéla, Loulo, Kalana, Tabakoto et Kadiéran – situées dans le sud ou le sud-ouest du pays. Le gisement le plus productif est celui de Morila, à ciel ouvert. Depuis 2000, il est exploité par la société Morila SA, dont le capital est détenu par les compagnies sud-africaines Anglogold Ashanti (40 %) et Randgold Resources (40 %), ainsi que par l’État malien (20 %). Après un pic en 2003 (à 23,74 tonnes), sa production est tombée à 17,63 tonnes en 2004 avant de remonter à 23,83 tonnes l’année suivante. Avec des réserves prouvées de 160 tonnes, Morila pourrait être en service jusqu’en 2012. Sadiola est le deuxième gisement du pays. Exploité par la Semos, qui associe le sud-africain Anglogold Ashanti (38 %), le canadien Iamgold (38 %), l’État malien (18 %) et la Société financière internationale (6 %), filiale d’investissement de la Banque mondiale, il a produit 15,1 tonnes en 2005, en léger recul en un an (15,57 tonnes en 2004). Vient ensuite la mine de Yatéla, valorisée par le consortium Iamgold (40 %), Anglogold Ashanti (40 %) et l’État malien (20 %), qui affiche une production plus modeste : 8 tonnes en 2005.
La production de Loulo, dont l’opérateur est Somilo (Randgold 80 %, État malien 20 %), n’a été que de 1,64 tonne en 2005. Mais le site dispose d’un potentiel important : une durée de vie de vingt ans, 45 tonnes de réserves d’or à ciel ouvert, des ressources de 110 tonnes dans sa partie sulfurée et, plus en profondeur, un gisement estimé à 60 tonnes. Une nouvelle étape a été franchie en novembre dernier dans son exploitation, avec le lancement de l’extraction en profondeur. Cette phase d’extension mobilisera plus de 50 milliards de F CFA sur cinq ans. Durant cette période, la mine, qui emploie déjà plus d’un millier de personnes, créera 1 000 nouveaux emplois. En outre, le ravitaillement en carburant et en équipements ainsi que certains aspects du transport seront exécutés par des privés nationaux. Enfin, Kalana n’a produit que 540 kg en 2005. Mais son exploitation, qui avait été mise en veilleuse en décembre 1991, n’a été relancée qu’en 2004. Elle est assurée par la Somika (détenue par Avnel Gold, filiale du canadien Nevsun Resources, et l’État malien). Ses réserves sont estimées à 14 tonnes et sa durée de vie entre douze et vingt ans.
Deux nouvelles exploitations entrent en service cette année, à commencer par la mine à ciel ouvert de Tabakoto, située à 350 km à l’ouest de Bamako. Inaugurée en mai 2006, elle renfermerait 58 tonnes d’or. La production attendue est de 3,1 tonnes en 2007, puis de 3,4 tonnes en 2008 et en 2009. Elle est assurée par la Tabako Mining Company (Tamico), dont le capital est détenu par Nevsun Resources (80 %) et l’État malien. Le gisement de Kodiéran devrait commencer sa production en 2007. Exploité par Wassoulor SA, dont le capital est détenu à hauteur de 80 % par un privé malien et de 20 % par l’État, il pourrait produire 5 tonnes par an. Deux usines sont en cours d’installation. Elles entreront successivement en service, et il est prévu qu’elles soient toutes deux opérationnelles en juin prochain. Les investissements déjà réalisés s’élèvent à 24 milliards de F CFA.
L’année 2008 devrait voir le redémarrage de l’exploitation de la mine d’or de Syama, qui avait été arrêtée en mars 2001, en raison de la baisse des cours mondiaux de l’or et à la suite des difficultés rencontrées sur le terrain par la Somisy, la société exploitante. Reprise par le groupe australien Resolute, qui possède 80 % du capital, aux côtés de l’État malien (20 %), la Somisy va investir quelque 60 milliards de F CFA pour redémarrer ses activités. De quoi assurer cinq années d’exploitation et créer 700 emplois locaux. Le coulage du premier lingot d’or est prévu dans le courant du second semestre 2007.
L’exploitation de ces nouveaux gisements permettra en partie de compenser la baisse de production inéluctable des mines de Sadiola, Morila, Yatéla. Mais, à terme, tous les espoirs sont permis. Des réserves nouvelles, évaluées à un total de 600 tonnes, ont été identifiées dans les régions de Kayes et de Sikasso. Dopée par la remontée des cours depuis 2003, la recherche de nouveaux gisements bat son plein. Fin 2005, quelque 120 titres miniers, en majorité centrés sur l’or, avaient été délivrés par les autorités. Outre les zones traditionnelles, de nouvelles régions pourraient être prospectées. Notamment dans le nord du pays, depuis la découverte d’un gisement aurifère important au sud de l’Algérie. Pour intensifier l’exploration, le gouvernement a lancé le 6 mai 2006, un programme de développement du secteur minier. Objectifs : améliorer le cadre de l’investissement, approfondir la connaissance géologique et l’inventaire et diversifier les productions. Par ailleurs, le code minier du pays est en révision pour se mettre en conformité avec le code communautaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) en place depuis la fin 2003. Simultanément, le développement de l’extraction artisanale, qui produit entre 3 et 4 tonnes d’or par an, est encouragé afin de démultiplier les effets induits de l’exploitation aurifère sur l’économie locale. Selon le ministère des Mines, la contribution du métal jaune à l’économie du pays a été de 620,72 milliards de F CFA entre 1997 et 2005. Grâce à quoi l’État, les salariés des mines et les sociétés prestataires de services ont empoché respectivement, chaque année, 144,14 milliards de F CFA, 34 milliards de F CFA et 20,3 milliards de F CFA. Une petite pierre à l’édifice de la lutte contre la pauvreté.

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