À la BAD, querelle de légitimité parmi les salariés inquiets face à Adesina

Avant de déborder des couloirs du siège d’Abidjan, le mouvement de contestation contre la gouvernance d’Akinwumi Adesina, le président de la Banque africaine de développement (BAD), semble avoir engendré des tensions parmi les salariés frondeurs, entre désaccords sur la stratégie à suivre et accusations de sabotage.

Akinwumi Ayodeji Adesina, en 2015. © Vincent Fournier/JA

Akinwumi Ayodeji Adesina, en 2015. © Vincent Fournier/JA

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Publié le 15 avril 2020 Lecture : 3 minutes.

Akinwumi Adesina, patron de la Banque africaine de développement depuis 2015, est candidat à sa réélection en 2020. © AFDB/Flickr
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Finance – Six mois qui ont ébranlé la BAD

Mis en cause par des salariés, Akinwumi Adesina, le patron de la Banque africaine de développement, traverse la plus grave crise de sa carrière.

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À la suite de la publication de notre article du 10 avril au sujet du conflit interne à la BAD, un « groupe de salariés inquiets » de l’institution panafricaine nous a écrit, se revendiquant comme les auteurs de la lettre officielle envoyée au comité d’audit au début de l’année.

Dans leur message, ils contestent tout contact avec la presse. Ils soulignent notamment une différence subtile entre l’adresse e-mail de contact indiquée dans la « complainte officielle » et celle utilisée pour l’envoi d’un courrier électronique à JA, cette fois à la fin de février. « Ceux qui prétendent être nous ont partagé avec vous notre document original. À l’époque, nous n’avions envoyé ce document d’information qu’à trois personnes », insiste ce collectif.

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Difficile de trancher indubitablement la querelle de légitimité entre ces multiples interlocuteurs. Au moins trois adresses e-mails légèrement différentes mais très proches ont été indiquées ou utilisées depuis plusieurs mois par des groupes anonymes se réclamant tous de la fronde contre le président de la BAD.

« Il est clair que certaines personnes malveillantes tentent de se faire passer pour nous afin d’ajouter à la confusion sur cette question. Cela ne nous surprend pas. Ce n’est pas la première fois », a-t-il été répondu, le 12 avril, au message envoyé à cette adresse « officielle ». « Il se peut que d’autres initiatives émanant du personnel aient recensé certains des mêmes [agissements reprochés au président Adesina], car ils sont bien connus d’un grand nombre de personnes à la Banque, mais nous n’en avons pas connaissance », avance le groupe « initial » de lanceurs d’alerte.

Crainte de représailles

Au début de mars, pourtant, un collectif de salariés – frondeurs, dissidents ou « malveillants », c’est selon – nous avait contacté, assurant craindre également des représailles. « Nous sommes très nerveux face à une éventuelle exposition, car il y a des tentatives pour découvrir nos identités. C’est pourquoi nous changeons d’approche après six semaines [de silence vis-à-vis des médias]. Veuillez comprendre que nous ne souhaitons pas d’échanges supplémentaires », avaient-ils écrit à JA.

Au sujet de la lettre ouverte en français, expédiée à JA à la fin de janvier, particulièrement détaillée et souvent véhémente vis-à-vis du patron de la BAD et de plusieurs haut responsables promus par ce dernier, tous nommément identifiés et dont les décisions autant que l’éthique, voire les qualifications, étaient abondamment contestées, les auteurs de la dénonciation officielle au comité d’audit prennent leurs distances.

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« Nous sommes convaincus qu’après des tentatives infructueuses pour découvrir nos identités, des personnes malveillantes proches du président [Adesina] ont décidé de discréditer notre initiative en la divulguant à la presse. Si la fuite avait été découverte, notre statut de lanceurs d’alerte aurait pu être annulé », affirme au contraire le groupe qui se revendique comme celui de la plainte initiale.

Escalade dans le conflit

Les conflits de légitimité ou les accusations de sabotage entre les salariés frondeurs vont bien au-delà de la stratégie de communication externe. En effet, selon nos informations, à la mi-mars, une contre-plainte a été déposée contre un membre du Comité d’éthique de la BAD « pour collusion présumée avec les lanceurs d’alerte », provenant « d’un groupe qui prétend être dissident de notre propre groupe ce qui peut être facilement prouvé comme une fausse déclaration », affirment les frondeurs « originels » dans une « communication » envoyée en avril, cette fois à l’ensemble des gouverneurs de l’institution panafricaine. Soit une nouvelle escalade dans le conflit entre le patron de la BAD et ses salariés anonymes. Quels qu’ils soient.

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