Programmé pour gagner

Solutions informatiques, centres d’appels, transferts d’argent Le groupe sénégalais poursuit son irrésistible ascension.

Publié le 19 février 2007 Lecture : 3 minutes.

L’aventure commence en 1994 avec le lancement d’un serveur vocal qui permet à la clientèle de la Société générale de banques au Sénégal (SGBS) de consulter ses comptes par téléphone. Chaka Computer était née. L’entreprise sénégalaise vend alors sa solution Vocalia à toutes les Société générale africaines, puis aux Postes et Caisses d’épargne. En 1997, l’entreprise assure le passage de la numérotation téléphonique à sept chiffres, puis conçoit un logiciel pour la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC).
En 2001, Chaka Computer fonde un centre d’appels pour l’opérateur en téléphonie mobile Sentel. La filiale Call Me est créée. « Ensuite, nous sommes allés démarcher les autres », se souvient El Hadj Malick Seck, directeur du développement du groupe. La Sénélec, l’aéroport de Dakar, la Banque de l’habitat du Sénégal (BHS), ainsi que les Pages jaunes se sont laissés séduire. En 2003, Call Me prospecte hors des frontières et se lance dans l’activité offshore avec le français Neuf Télécom. La société s’implante aussi dans la sous-région, au Mali (Ikatel), où elle emploie 360 personnes, en Côte d’Ivoire, au Bénin et, tout dernièrement, en Mauritanie.
« Les relations clients sont de plus en plus intégrées dans les stratégies des entreprises, mais celles-ci ont compris qu’il était préférable de nous confier cette activité qui est notre cur de métier », se réjouit Mbayang Cissé, directrice du centre de Dakar, qui traite entre 20 000 et 25 000 appels par jour. La plupart des téléopérateurs sont de jeunes recrues. Après un emploi dans la restauration, Thierry, 30 ans, accepte « ce changement de carrière, car Call Me offre des perspectives de promotion ». En attendant, son salaire mensuel est de 103 000 F CFA (157 euros). Fatima, 22 ans, a intégré pour la première fois un centre d’appels durant ses études de marketing et de commerce international : « J’aurais préféré trouver un emploi dans ma branche, mais, à défaut, Call Me m’assure un revenu. » Aissatou, 23 ans, diplômée de l’École supérieure polytechnique (ESP), en est persuadée : « Seuls les centres d’appels recrutent actuellement. » Parmi la dizaine d’opérateurs présents au Sénégal, les plus importants, outre Call Me, sont PCCI, Africatel, AVS et Center Value.
« Notre croissance s’appuie sur l’expertise acquise dans l’ingénierie informatique », explique Malick Seck. Le dernier-né du groupe, Money Express, créé en 2001, en est la preuve. Grâce à un serveur Internet d’interconnexions sécurisées entre les agences de transfert d’argent en Europe ou en Amérique du Nord et les Postes et Caisses d’épargne en Afrique, Chaka bouscule un marché jusqu’alors dominé par Western Union et Money Gram. « Notre procédé nous permet d’être moins chers que nos concurrents avec une commission de 3 % à 4 % sur les montants envoyés, explique le PDG du groupe, Meïssa Déguène Ngom. Seule la libéralisation permettra de réduire les coûts pour la clientèle et donc de lutter contre l’informel. » En 2005, sur 325 milliards de F CFA transférés au Sénégal par la diaspora, près de 45 milliards ont transité par le réseau Money Express. Un chiffre appelé à croître. Le 16 novembre dernier, la société a obtenu un agrément pour ouvrir une agence en Italie. « C’est une première, car, ailleurs en Europe, nous devons passer par Travelex ou MoneyTrans », précise Meïssa Déguène Ngom, bien décidé à étendre son réseau.
L’avenir de Chaka repose aussi sur le développement d’une carte bancaire biométrique qui devrait assurer une plus forte sécurisation des données et offrir une parade efficace contre les tentatives de fraude. « La réussite du groupe est un motif de fierté, surtout lorsque je regarde les 690 emplois créés », confie ce businessman de 45 ans, né à Dakar, parti en France pour apprendre le métier et revenu au pays « pour se battre et avancer ». Le pari a été réussi. Un jury d’hommes d’affaires sénégalais a élu Money Express « entreprise de services 2006 » et Meïssa Déguène Ngom « patron de l’année ». « Le plus important, c’est de vouloir », conclut l’heureux lauréat, d’une voix douce mais déterminée, rappelant l’épopée d’un guerrier zoulou qui, au XIXe siècle, lutta contre les Néerlandais et les Britanniques en Afrique du Sud. Il s’appelait Chaka.

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