Larbi Ounoughi, l’homme qui veut mettre de l’ordre dans les médias en Algérie
La nomination de Larbi Ounoughi à la tête de l’Agence nationale d’édition et de publicité (Anep), dans un contexte tendu entre le pouvoir et une partie des médias algériens, est le prélude à une large réforme du secteur.
Le gouvernement a décidé de s’attaquer au nerf de la guerre de la presse : la publicité. L’ancien journaliste et directeur de presse, Larbi Ounoughi, a été installé lundi 6 avril dans ses fonctions de PDG de l’Agence nationale d’édition et de publicité (Anep). Aussitôt nommé, le nouveau patron de cet organisme, qui détient le monopole de la publicité publique, résume la mission qui lui a été confiée : l’assainissement du secteur des « forces illégales » en coordination avec la famille de la presse. Dans la foulée de cette nomination, Ammar Belhimer, ministre de la Communication, annonce la préparation d’une loi sur la publicité ainsi que la mise en place d’un cadre juridique pour assainir le secteur « en le mettant sur une nouvelle voie empreinte de transparence ». Il y a loin de la coupe aux lèvres.
L’arrivée de Ounoughi et l’élaboration d’une nouvelle loi sur la publicité interviennent dans un contexte tendu entre le pouvoir et une partie des médias algériens. Quatre journalistes – dont le correspondant de RSF, Khaled Drareni – sont actuellement en prison pour des motifs divers, cinq autres, dont l’ex-patron de la chaîne Beur TV, sont également détenus depuis mars dans le cadre d’une affaire de chantage, de menace et d’extorsion de fonds. Le site d’information économique et politique Maghreb Emergent, ainsi que Radio M, critiques à l’égard du président Abdelmadjid Tebboune, viennent d’être censurés par les autorités, qui leur reprochent, entre autres, de recourir à des financements étrangers. Ce que les médias en question ont démenti par communiqué, se réservant le droit d’ester en justice.
« Nid de corruption »
Peu de temps avant d’être porté à la tête de l’Anep, Ounoughi avait prononcé un réquisitoire accablant sur la gestion de la manne publicitaire publique par d’anciens responsables, dont certains font aujourd’hui l’objet d’enquêtes de la gendarmerie et de l’IGF (Inspection générale des finances). Dans un entretien accordé à Al Hayat TV, il n’a pas hésité à qualifier l’Anep de « nid de corruption » et de repaire de la « Issaba » (le vocable utilisé pour qualifier l’ancien clan présidentiel, assimilé à une bande mafieuse). Évoquant de graves dérives en matière de prédation et de détournement de fonds publics, Ounoughi juge que l’anarchie doit cesser.
La mission d’Ounoughi est d’autant plus compliquée que le budget de l’Anep a fondu comme neige au soleil
C’est peu dire que la mission qui a été assignée à cet homme, qui avait notamment dirigé avec réussite deux journaux arabophones (An Nasr et Al Massa) avant de démissionner, en 2015, pour divergences avec le ministre de la Communication, confine au nettoyage des écuries d’Augias. Elle est d’autant plus compliquée que, en raison de la crise financière qui touche l’Algérie, le budget de l’Anep a fondu comme neige au soleil.
De 130 millions d’euros en 2013, celui-ci a été divisé par deux. Idem pour le marché publicitaire, qui connaît désormais le temps des vaches maigres. À la même période, il était estimé à 350 millions de dollars grâce notamment au secteur de l’automobile, de la téléphonie et de l’agroalimentaire.
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