Le retour des cerveaux

Programmes de financement, exonérations fiscales, prêts à taux réduits… Pékin ne ménage pas ses efforts pour inciter les expatriés à revenir. Non sans succès.

Publié le 16 janvier 2004 Lecture : 3 minutes.

La Chine peut-elle parvenir à endiguer la fuite des cerveaux, dont elle souffre depuis la réouverture de ses frontières, en 1979 ? Le gouvernement du président Hu Jintao tente par tous les moyens de persuader ses concitoyens partis étudier à l’étranger de revenir, afin de contribuer au développement économique de leur pays. Un réel défi pour les autorités chinoises, quand on sait que sur les quelque 600 000 étudiants qui ont quitté le pays les vingt-cinq dernières années, seuls 160 000 sont revenus. Les autres ont décidé de rester aux États-Unis, en Australie ou encore en Europe, privant ainsi la Chine d’un savoir qui lui fait cruellement défaut. Car si l’empire du Milieu dispose du plus grand vivier de main-d’oeuvre de la planète, il souffre d’un sérieux déficit de matière grise.
Le taux de scolarisation dans l’enseignement supérieur n’atteignant même pas 1 %, la contribution économique et intellectuelle des Chinois formés à l’étranger est considérable. La plupart prennent le chemin des affaires. Certains rejoignent les rangs des multinationales étrangères et des entreprises d’État. Mais beaucoup préfèrent créer leur propre société. Rien qu’à Pékin, on dénombre ainsi plus de 3 300 entreprises créées par d’anciens émigrants. Avec la bénédiction des autorités chinoises.
Dès le début des années 1990, lors du passage à l’économie socialiste de marché, le ministère de l’Éducation a mis en place un programme de financement destiné à aider ces enfants prodigues à devenir de parfaits entrepreneurs. Durant les dix dernières années, 48 millions de dollars ont ainsi été attribués à 20 000 diplômés ayant décidé de rentrer. Plus de soixante-dix parcs d’affaires, dont Zhongguancun, la Silicon Valley chinoise, leur sont entièrement réservés. Ils bénéficient également d’exonérations fiscales, de prêts à taux réduits ou encore de formations pour les aider à se familiariser avec la bureaucratie chinoise. La priorité a été donnée aux technologies de pointe. La plupart des grosses sociétés privées orientées vers les nouvelles technologies ont donc été créées par ces anciens exilés.
Autre signe de l’intérêt du gouvernement pour ces diplômés : la présence du président Hu Jintao à une cérémonie marquant le 90e anniversaire de l’Association des anciens élèves à l’étranger. Le plus haut dignitaire du Parti communiste chinois avait même ouvert, pour l’occasion, les portes du palais de l’Assemblée du peuple aux 4 000 membres de l’association venus célébrer cet événement. Tout un symbole, quand on sait que c’est le le lieu où se rassemblent d’ordinaire les cadres du parti ou les loyaux soldats de l’Armée populaire de libération. Lors de son discours, Hu Jintao a rappelé le rôle capital joué par les élites formées à l’étranger, qualifiées de « force vitale de la Chine », dans le développement économique du pays.
Avec un taux de croissance annuel situé entre 7 % et 8 %, l’empire du Milieu est bel et bien en marche vers le capitalisme et offre de réelles perspectives de réussite professionnelle et financière. Il n’est donc pas étonnant que de plus en plus de Chinois décident de rentrer dans l’espoir de réaliser une brillante carrière. La mauvaise conjoncture économique qui prévaut en Europe et aux États-Unis n’est certainement pas étrangère à l’accélération de ces retours, qui ont doublé entre 2001 et 2002. L’intégration de la Chine dans la communauté économique internationale, grâce à son entrée dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à la fin de 2001, non plus. Le rêve chinois semble petit à petit prendre le pas sur le rêve américain.

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