Dernier bastion de la liberté

SW Radio Africa, seule station indépendante diffusant au Zimbabwe, a fêté ses 2 ans.

Publié le 16 janvier 2004 Lecture : 2 minutes.

SW Radio Africa a fêté, le 19 décembre, son deuxième anniversaire. Un exploit quand on connaît la situation précaire de la liberté de la presse au Zimbabwe. La fondatrice de SW Radio Africa, Gerry Jackson, en sait quelque chose puisqu’il y a trois ans, alors à la tête de Capital Radio, une station privée basée à Harare, elle avait dû couper le son. Tenace, la journaliste n’en est pas restée là. Avec une poignée de collègues, elle part pour Londres, d’où émet aujourd’hui SW Radio Africa. À l’époque, l’association Reporters sans frontières classait déjà le Zimbabwe comme le « pays le plus répressif d’Afrique australe en matière de liberté de la presse ». Une aubaine pour Gerry Jackson, qui utilise cet argument pour demander de l’aide aux ONG, et obtenir assez vite les fonds pour créer SW Radio Africa. L’antenne est prise le 19 décembre 2001, et le succès est immédiat grâce à la publicité faite par quelques journaux indépendants. « Nous donnions aux gens l’occasion de s’exprimer », commente Violet Gonda, une des journalistes de l’équipe.
Pas facile cependant de couvrir le Zimbabwe depuis Londres… « Au début, nous suivions l’actualité du pays grâce aux journaux privés. Très vite, nous avons dû diversifier nos sources en trouvant des informateurs et, surtout, en proposant un numéro de messagerie vocale sur laquelle les gens peuvent laisser leurs coordonnées de façon à recueillir leur témoignage », explique Violet. « Maintenant, nous sommes mieux informés que n’importe qui d’autre sur le terrain », confirme la fondatrice. Certains opposants au régime n’hésitent pas à s’exprimer. En revanche, « dans les petits villages, les auditeurs se branchent sur la fréquence de SW Radio Africa, enfermés chez eux. Car Mugabe a semé la terreur dans la tête de chacun », observe Andrew Meldrum, correspondant du quotidien britannique The Guardian et dernier journaliste étranger à avoir été expulsé du pays.
Confronté au succès de SW Radio Africa, au Zimbabwe mais aussi à l’étranger, et surtout à l’impossibilité de la rayer du paysage médiatique, le gouvernement n’a pas hésité à bannir les six journalistes qui y travaillent. « Un soir, le journal télévisé de la seule chaîne du pays, contrôlée par Mugabe, a annoncé que l’équipe de SW Radio Africa, le gouvernement britannique ainsi que d’autres hommes politiques du pays étaient interdits de séjour au Zimbabwe », se souvient avec émotion Violet Gonda. Quant aux familles des journalistes, restées au pays, elles n’ont pas tardé à recevoir des menaces. « Nous continuerons à émettre jusqu’à ce que Mugabe craque », rétorque la rédaction. Face à cette détermination, les partisans du régime zimbabwéen n’ont pas trouvé d’autres solutions que de lancer des rumeurs… SW Radio Africa serait financée, et donc contrôlée, par les États-Unis ou par Tony Blair…
« Nous faisons la sourde oreille. L’essentiel, c’est de donner l’information le plus objective possible », rectifie Violet. La directrice ne veut pas commenter ces critiques, car « ce serait alimenter une controverse qui n’a pas lieu d’être. » Ce qui lui tient à coeur maintenant, c’est de pouvoir émettre plus longtemps, grâce à d’autres soutiens financiers. Et, surtout, de le faire depuis son pays, un jour.

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