Une « nouvelle vague » chérifienne ?

Publié le 20 décembre 2006 Lecture : 2 minutes.

Pour la première fois cette année, deux films marocains ont participé à la compétition officielle. Jamais lors des précédentes éditions du FIFM, le cinéma local n’avait été à ce point à l’honneur. Ce qui prouve qu’il ne s’agissait pas de discrimination positive mais d’une reconnaissance de l’émergence d’un cinéma marocain dynamique, prolifique et parfois d’une qualité de niveau international. Les deux longs-métrages qui concouraient pour l’Étoile d’or étaient d’ailleurs réalisés par deux jeunes cinéastes, Faouzi Bensaïdi et Narjiss Nejjar, qui avaient vu en 2003 leur premier film sélectionné à Cannes. Ces deux oeuvres ont certes quelque peu déçu et, logiquement, elles n’ont pas eu droit à une présence au palmarès. Elles témoignaient cependant toutes deux d’une ambition réjouissante.

Celui qui a pris le plus de risque est sans doute Faouzi Bensaïdi, dont le WWW, What a wonderful world, déjà sélectionné à Venise en septembre dernier, ne ressemble à rien de déjà-vu. Ce thriller totalement atypique, tourné à Casablanca, avec le réalisateur interprétant lui-même le rôle principal d’un tueur à gages insensible qui devient sentimental, fait plus penser aux oeuvres de Tati voire de Buster Keaton qu’aux films noirs américains. Séduisant par son esthétique moderniste, par ses inventions scénaristiques ou formelles, jamais ennuyeux, il fonctionne malheureusement un peu à vide, ne suscitant que rarement l’émotion ou le rire.

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Wake up Morocco, de Narjiss Nejjar, n’est pas moins surprenant. Il mêle intimement l’histoire de personnages vivant sur un îlot au large de Casablanca – un ancien footballeur et une jeune fille qu’il a recueillie et élevée – et celle de la candidature malheureuse du Maroc en 2004 à l’organisation de la Coupe du monde de football de 2010. Ce film plein d’énergie, auquel le talent de coloriste et l’appétit de gros plans de la réalisatrice confèrent un style très contemporain, tient ses promesses pendant plus de la moitié de son déroulement avant de perdre l’essentiel de sa consistance pendant sa (trop) longue dernière partie, où les personnages deviennent quelque peu caricaturaux en affichant un discours patriotique sans nuance.

Quoi qu’il en soit, ces deux films aux thèmes très ancrés dans le Maroc actuel malgré leurs titres anglo-saxons – pour faire branché ? – s’inscrivent dans une cinématographie de plus en plus dynamique. Bensaïdi et Nejjar, après Nabil Ayouch et quelques autres, comme Leila Marrakchi, Noureddine Lakhmari et Yasmine Kassari font-ils partie d’une « nouvelle vague » chérifienne en train d’émerger ? Tant les différences de style entre ces auteurs que l’aspect encore souvent expérimental ou inachevé de leurs oeuvres permet de douter de l’apparition d’une nouvelle « école ». Mais on constate que, sans rejeter ses « anciens », toujours actifs comme Mohamed Abderrahmane Tazi et bien d’autres, le cinéma marocain paraît capable de se renouveler et de faire place à une génération de nouveaux talents. La politique de soutien des autorités au cinéma national trouve là sa pleine justification.

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