Technologie à grande vitesse

L’objectif est de faire de ce secteur d’activité l’un des moteurs de l’économie. Si le potentiel technique existe, il faut d’abord organiser un marché efficace et l’ouvrir à la concurrence.

Publié le 18 octobre 2004 Lecture : 4 minutes.

Moderniser les équipements et ouvrir le marché à la concurrence : sur le papier, les objectifs sont clairs. Pour la Tunisie, il s’agit de faire des télécommunications une activité stratégique, pourvoyeuse d’emplois et de devises. Les autorités prévoient que ce secteur participe déjà à hauteur de 6 % du Produit intérieur brut (PIB en 2004) au lieu de 3,3 % en 2000. Et les pouvoirs publics en ont fait une priorité. Ils financent un vaste programme d’investissements de 2,84 milliards de dinars tunisiens (1,83 milliard d’euros) pour la période 2002-2006.
« Miser sur l’avenir des télécommunications est un pari réaliste », estime Khaled Ben Jilani, spécialiste des nouvelles technologies de la société d’investissement Tuninvest. « La capacité technique des ingénieurs est d’un niveau analogue à celle des pays européens. » Toutefois, l’organisation du marché, la réglementation et les coûts des télécommunications ne le sont pas encore. Le secteur des entreprises innovantes, à forte valeur ajoutée, émerge à peine. Le paysage des télécommunications reste en effet dominé par l’opérateur public : « Tunisie Télécom a investi aussi bien dans les ressources humaines que dans les équipements et réseaux de communication les plus récents », affirme Ahmed Mahjoub, son PDG. Certes, mais Tunisie Télécom comptait 1,5 million d’abonnés en téléphonie fixe en 2003 (et un objectif de 2 millions de lignes à la fin de 2004). Soit un taux de couverture de 15 %, honorable pour un pays africain, mais très éloigné des standards européens.
C’est la téléphonie publique qui assure l’essentiel des services à la population, avec 7 500 boutiques Publitel, totalisant près de 28 000 terminaux téléphone et fax. Mais comme partout en Afrique, l’explosion de la téléphonie mobile a révélé des besoins inassouvis de communication, relançant le secteur. Après un appel d’offres, les autorités ont accordé, le 8 mars 2002, une licence de téléphonie mobile GSM à l’opérateur égyptien Orascom. Puis, après un accord avec son concurrent koweïtien Wataniya, les deux groupes ont créé une filiale : Tunisiana. En activité depuis décembre 2002, l’opérateur privé devrait atteindre le million d’abonnés à la fin de 2004.
Il prend aussi position sur des marchés de « niches » délaissés par son concurrent. Le nouveau service Bureau mobile de Tunisiana est ainsi conçu pour les professions libérales, les entrepreneurs et les cadres en déplacement : il permet de connecter téléphone mobile et ordinateur, offrant l’accès conjoint à l’Internet (avec un débit de 9,6 kilo-octets), à un service fax et à une boîte vocale. Stimulée par cette compétition, Tunisie Télécom annonce de son côté 2 millions d’abonnés au téléphone mobile. En principe, l’accès à l’Internet devrait aussi favoriser l’émergence de nouvelles sociétés dans le commerce et les services.
Selon l’Agence tunisienne pour l’Internet (ATI), la Tunisie compterait déjà 700 000 internautes. Mais la plupart d’entre eux se connectent au réseau via l’un des 300 centres publics Publinet. Le nombre d’abonnés serait en revanche plus modeste (76 000), quoique supérieur à celui affiché au Maroc (60 000).
Priorité nationale pour la Tunisie, qui accueillera en novembre 2005 la seconde phase du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI), le développement de l’Internet bute sur plusieurs obstacles. La faiblesse du contenu disponible, avec environ 500 sites créés localement, en est un. Une certaine obsession sécuritaire dans la « gouvernance » de l’Internet freine, par ailleurs, cet essor. Le coût d’accès et le faible débit (56 kilobits pour le grand public) sont également des handicaps, qui pourraient être progressivement levés par les fournisseurs de services Internet (FSI), dont cinq relèvent du secteur privé : Planet, GlobalNet, Topnet, Hexabyte, Tunet. Planet, qui domine ce marché, vient de lancer un abonnement grand public avec un débit de 128 kilobits, un début timide pour l’ADSL (Asymetric Digital Subscriber Line, accès à Internet à haut débit via une ligne téléphonique traditionnelle) : on est encore loin des 2 à 4 mégabits en vigueur en Europe.
Les entreprises disposent évidemment d’accès spécifiques à des systèmes plus performants, notamment la fibre optique. C’est un enjeu crucial, qui conditionne non seulement l’implantation de partenaires étrangers, mais aussi l’émergence d’un secteur comme les centres d’appels (voir ci-dessous). Or le réseau Tunipac (transmission de données par « paquets »), desservant les centres d’affaires des grandes villes, a atteint ses limites en termes de débit. Tunisie Télécom le remplace progressivement par un réseau multiservice, recourant à une technologie plus récente (ATM, Asynchronous Transfer Mode).
Davantage de concurrence stimule aussi la modernisation des systèmes. Un nouveau réseau satellitaire de transmission de données à haut débit, nommé « DSL in the Sky », sera opérationnel avant la fin de l’année. Résultat de la collaboration entre l’équipementier français Alcatel, le FSI Planet et l’opérateur monégasque Monaco Télécom, il devrait doper l’activité de Divona Télécom, premier titulaire d’une licence satellitaire Vsat privée en Tunisie. Mais le secteur privé des télécommunications n’en est qu’à ses débuts. Ainsi, l’ouverture de 10 % du capital de Tunisie Télécom est annoncée depuis près de trois ans. Cependant les privés se font encore attendre, notamment en raison du coût important des investissements à réaliser.

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