Crise en Libye : le maréchal Haftar dans l’impasse ?

En difficulté militairement, Khalifa Haftar s’est autoproclamé seul dirigeant de la Libye lors d’une allocution télévisée, le 27 avril. Un coup de bluff qui semble avoir fait flop, aussi bien à l’étranger que dans le pays.

Le maréchal libyen Khalifa Haftar a proclamé durant une allocution télévisée, le 28 avril 2020, avoir reçu le mandat du peuple pour diriger son pays. © LNA War Information Division/AFP

Le maréchal libyen Khalifa Haftar a proclamé durant une allocution télévisée, le 28 avril 2020, avoir reçu le mandat du peuple pour diriger son pays. © LNA War Information Division/AFP

MATHIEU-GALTIER_2024

Publié le 5 mai 2020 Lecture : 5 minutes.

En soixante-douze heures, Khalifa Haftar s’est déclaré vainqueur du jeu de poker libyen, avant d’y mettre fin lui-même. L’homme fort de l’est du pays s’est auto-promu, le 27 avril, seul dirigeant de la Libye, répondant ainsi à « la volonté du peuple », et annonçant au passage le transfert de tous les pouvoirs à son autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL).

Actant la mort de l’accord de Skhirat du 17 décembre 2015, le maréchal a décrété caducs les organes politiques associés : le gouvernement d’union nationale (GUN) de son ennemi Fayez al-Sarraj et le Haut Conseil suprême (l’équivalent d’une chambre haute législative) installés à Tripoli, ainsi que l’Assemblée du peuple (chambre basse), basée à Tobrouk, à qui il doit pourtant son grade militaire. Dans la nuit de mercredi à jeudi, le militaire de 77 ans s’est empressé de proposer une trêve dans la bataille de Tripoli, qu’il avait lui-même lancée le 4 avril 2019.

Improvisation

Malgré le premier verset de la sourate 48 du Coran – « Nous t’avons accordé une victoire éclatante » – se référant à l’entrée triomphante des hommes du Prophète à La Mecque, soigneusement calligraphiée derrière le pupitre de Haftar lundi, son discours n’a en rien été performatif. Les institutions politiques sont toujours en place et deux civils sont morts samedi sous des tirs venant de l’ANL après le refus de la trêve par Tripoli.

Il s’agit d’une fuite en avant peu réfléchie de Haftar

Pour Wolfram Lacher, spécialiste de la Libye au sein de l’Institut allemand des affaires internationales et de sécurité (SWP), « il s’agit d’une fuite en avant peu réfléchie de Haftar : le Parlement de Tobrouk et son gouvernement [non reconnu par l’ONU] lui servaient de cache-sexe civil sans gêner son pouvoir ». Le GUN s’est permis de qualifier l’annonce de « farce », fort des avancées militaires de ses milices sur le front ouest.

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