Arafat fait de la résistance

Publié le 19 octobre 2004 Lecture : 3 minutes.

Si Yasser Arafat accuse le poids de ses 75 ans et se fragilise, il n’a aucune intention de décrocher. C’est l’impression qu’il a donnée à un groupe de journalistes britanniques, dont Roula Khalaf, du Financial Times, qu’il a reçus à dîner pendant trois heures, la semaine dernière. Enfermé depuis quarante et un mois avec interdiction de sortie par les Israéliens dans son quartier général de Ramallah, il s’est quand même arrangé pour faire le ménage dans l’Autorité palestinienne, s’entendant avec les uns, en écartant d’autres. Il s’est réaffirmé comme le seul interlocuteur des médiateurs égyptiens qui s’efforcent de faciliter le retrait israélien de la bande de Gaza et donnent un coup de main pour la réorganisation des services de sécurité palestiniens.
Il sourit malicieusement lorsque, au cours du dîner, on vient lui annoncer que le Premier ministre israélien Ariel Sharon a été mis en minorité à la Knesset. Et il montre fièrement les écussons épinglés sur son uniforme qui lui ont été remis par ses visiteurs étrangers, et notamment des Israéliens représentant le camp de la paix. S’il a parfois des difficultés d’élocution, il a encore manifestement toute sa mémoire.
Arafat explique que les Palestiniens se préparent au retrait israélien de Gaza, mais insiste sur le fait que ce doit être un vrai retrait et pas seulement un redéploiement. « Si Israël reste présent sur la frontière avec l’Égypte et occupe les routes entre Gaza et la Cisjordanie, dit-il, ce ne sera qu’un redéploiement. » Il se déclare « scandalisé » par les propos prêtés par le quotidien israélien Ha’aretz à Dov Weisglass, le bras droit d’Ariel Sharon, et selon lesquels ce plan d’évacuation de Gaza était destiné à « mettre dans le formol » le processus de paix (voir « Kiosque » p. 26).
Arafat s’amuse de l’intention prêtée à Israël de détruire les logements dans les colonies évacuées. « Ce serait une très bonne idée, explique-t-il. La situation est très difficile à Gaza. La zone est surpeuplée. Les logements dans les colonies sont des maisons individuelles, pas des appartements. Nous, il faudra que nous construisions des immeubles. »
Arafat a bien l’intention de prendre les choses en main à Gaza si les Israéliens s’en vont. Il lui faudra quand même leur autorisation pour s’y rendre. « Je contrôle tous les membres des services de sécurité, de la défense et de la sécurité préventive, souligne-t-il. À Gaza, il y a des difficultés parce que je ne suis pas là-bas franchement. Ici, en Cisjordanie, tout se passe bien. »

De source égyptienne, on indique que les Palestiniens sont en train d’organiser à Gaza un comité national qui réunirait toutes les grandes tendances, y compris les groupes radicaux, et qui participerait aux décisions stratégiques.
Arafat a manifestement la nostalgie des années du processus d’Oslo qui, du terroriste qu’il était, ont fait un dirigeant respectable reçu à la Maison Blanche. Il évoque souvent la mémoire de son « partenaire » Itzhak Rabin, le Premier ministre israélien assassiné en novembre 1995. Quatre ans après le début de la seconde Intifada, il sait que les chances de créer un État palestinien indépendant se sont fortement réduites. « Nous avons incontestablement subi de lourdes pertes, reconnaît-il. Nous avons eu des milliers de morts, nos infrastructures ont été détruites, nous sommes coupés de nos meilleures terres agricoles par le « mur de Berlin » et nos impôts nous sont confisqués par Israël. »

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Paradoxalement, il est arrivé à la conclusion que la situation serait meilleure pour les Palestiniens si le Premier ministre israélien n’était pas Sharon mais Benyamin Netanyahou, l’actuel ministre des Finances. « C’est difficile avec Sharon, explique-t-il. Sans doute Netanyahou déclare-t-il qu’il est contre le retrait de Gaza, mais il est en campagne électorale. »
Selon le ministre palestinien de l’Intérieur, Hakam Balaaoui, une proposition palestino-égyptienne de cessez-le-feu, accompagnée d’un retour à la moribonde « feuille de route » vers la paix, sera soumise aux Israéliens dans les semaines à venir.

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