Mariage de raison

Publié le 18 septembre 2006 Lecture : 2 minutes.

« C’est une victoire de la raison. » Tel est le commentaire récurrent dans la presse arabe au lendemain de l’annonce, le 11 septembre, d’un accord entre le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, et son Premier ministre, Ismaïl Haniyeh, issu de Hamas, pour la formation d’un gouvernement d’union nationale. Jusqu’ici, un tel projet paraissait irréalisable tant les divergences étaient profondes entre les deux hommes. Grands vainqueurs des législatives de janvier dernier, les islamistes de Hamas refusaient de prendre à leur compte les accords de paix signés en 1993 entre l’OLP et les Israéliens. De leur côté, les dirigeants du Fatah, le mouvement d’Abbas, rejetaient toute participation à un exécutif dominé par le Hamas.
« C’est en effet l’esprit de responsabilité qui a fini par prévaloir de part et d’autre », estime un analyste arabe, qui relève aussitôt que « le peuple a été durement touché par les sanctions financières » imposées par les Américains et les Européens depuis l’arrivée des islamistes aux affaires. L’aide internationale, qui représente 30 % du PIB, a été réduite de 50 %. Conséquences : « deux ménages sur trois seront condamnés, en 2007, à vivre en dessous du seuil de pauvreté », selon un rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) ; et les quelque 165 000 fonctionnaires ne sont pratiquement plus payés. D’où la grève générale entamée dans les Territoires le 2 septembre.
Politiquement, la cause palestinienne a pâti de cette situation. Le gouvernement était totalement isolé sur le plan international depuis la décision du Quartet (États-Unis, UE, ONU et Russie) de le bouder tant qu’il n’aura pas satisfait à une triple exigence : reconnaissance explicite de l’État hébreu, adhésion aux accords déjà passés entre celui-ci et l’OLP et abandon de la lutte armée.
Même si Haniyeh sera maintenu à la tête du gouvernement, la composition de ce dernier sera sensiblement modifiée. La majorité de ses membres seraient des technocrates, et les membres du Fatah y occuperont des postes clés. Son programme sera fortement inspiré du « Document d’entente nationale » adopté fin juin, à l’initiative de Marwane Barghouti et d’autres leaders détenus dans les prisons israéliennes, par les différentes factions locales, dont le Fatah et le Hamas. Le texte préconise de « concentrer » la résistance armée dans les Territoires occupés en 1967. Il prévoit également l’instauration d’un État indépendant sur ces mêmes territoires. Ses signataires reconnaissent ainsi implicitement l’État hébreu.
L’accord entre le Hamas et le Fatah, lui, va plus loin. Il donne mandat à Abbas de relancer les négociations avec Tel-Aviv. « Voilà une nouvelle chance pour le processus de paix », commente un spécialiste occidental. Tony Blair, le Premier ministre britannique, et Miguel Angel Moratinos, le ministre espagnol des Affaires étrangères, l’ont applaudi avant de plaider pour une reprise immédiate de l’aide européenne. Mais les Israéliens et les Américains semblent, du moins pour le moment, hostiles à cette sortie de crise. À en croire un diplomate européen, « ils s’obstinent à chercher l’impossible : une victoire absolue sur le Hamas »

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires