Un Machiavel sentimental

Sincèrement convaincu que la mission historique des États-Unis est de combattre la tyrannie par tous les moyens, il fut l’un des principaux maîtres d’oeuvre de la guerre en Irak. Désormais écarté du Pentagone, il engage à la tête de la Banque mondiale une

Publié le 18 juillet 2005 Lecture : 13 minutes.

« Quel dommage que Paul ait laissé tomber les maths ! » Jacob Wolfowitz savait de quoi il parlait. Décédé en 1981, le père de l’ancien secrétaire adjoint à la Défense des États-Unis, devenu, le 1er juin dernier, le président de la Banque mondiale, était lui-même un mathématicien de haut vol. Peut-être le meilleur statisticien de son temps, aux dires des spécialistes.
Comme beaucoup de pères, il rêvait de voir son fils suivre ses traces, ce que ce dernier entreprit d’abord de faire à l’université Cornell, à New York, où il obtint ses premiers diplômes, avant de rejoindre sans crier gare le département de sciences politiques de l’université de Chicago, fief du philosophe heideggerien Leo Strauss (1899-1973) et creuset de la future idéologie néoconservatrice. Par la suite, à l’instigation de ses nouveaux maîtres, Paul s’aventurera sur les sentiers souvent mal famés de la politique.
Eût-il suivi la voie royalement académique qui s’ouvrait à lui qu’il eût épargné au monde – et singulièrement aux Irakiens – bien des malheurs. Et à lui-même bien des avanies. Car Paul Dundes Wolfowitz (61 ans), ce brillant intellectuel que tous ceux qui le connaissent s’accordent à trouver charmant, sensible et attentionné, est aujourd’hui l’un des hommes les plus haïs de la planète. Dans la ménagerie de l’infamie, ses innombrables détracteurs lui ont trouvé une place de choix, quelque part entre le « faucon » et le « velociraptor », un affreux saurien préhistorique. C’est la règle du jeu, bien sûr, et sans doute l’a-t-il bien cherché, mais on jurerait que, lorsqu’il ne s’en amuse pas, il lui arrive d’en souffrir. « Quand je lis certains articles me concernant, je ne m’aime pas du tout ! » ironise-t-il.
Dans les années 1960, il accompagnait chaque année à Paris l’un de ses professeurs, le flamboyant Allan Bloom, auteur de The Closing of the American Mind et modèle du Ravelstein de Saul Bellow, roman dans lequel Wolfowitz apparaît d’ailleurs, fugitivement, sous son vrai nom. Le maître et l’élève rendaient rituellement visite à Alexandre Kojève, le grand hégélien français d’origine russe qui fut l’un des principaux inspirateurs de l’« école de Chicago ». On imagine que la conversation devait approcher des nuées ! Comment, parvenu au faîte du pouvoir, ce même Wolfowitz a-t-il réussi à supporter si longtemps un bateleur provincial comme Donald Rumsfeld, un fan de base-ball porté tour à tour sur les spiritueux et le spirituel comme l’héritier du clan Bush ou un affairiste brutal comme Dick Cheney ?
Il y a là un mystère dont l’origine est sans doute à rechercher autant dans l’histoire familiale de Wolfowitz que dans sa formation universitaire.
Jacob Wolfowitz fuit sa Pologne natale et débarque à New York en 1920. Comme beaucoup d’immigrants juifs, il s’installe dans le quartier de Brooklyn avant de faire aux États-Unis la carrière que l’on sait. Mais plusieurs membres de sa famille restés en Pologne seront, vingt ans plus tard, victimes de la barbarie hitlérienne.
Comme tous ses amis néoconservateurs, Wolfowitz est très attaché à Israël, mais d’une façon sans doute moins excessive et moins… unilatérale que beaucoup d’autres. Certes, plusieurs membres de sa famille se sont établis en Terre promise – à commencer par Laura, sa soeur, qui exerce la profession de biologiste -, mais lui-même ne s’y rend que rarement. Surtout, il est le seul de ses amis politiques à avoir exprimé sa compassion pour « les souffrances » des Palestiniens – ce qui lui valut d’être copieusement hué lors d’une grande manifestation de soutien à Israël, à Washington, en 2002 -, et l’un des premiers à avoir pris publiquement position pour la création d’un État palestinien. De même, il lui est arrivé à plusieurs reprises d’exprimer par écrit ses regrets à des familles irakiennes, victimes « collatérales » d’opérations américaines. C’est peu de chose, sans doute, mais rien ne l’y obligeait.
Reste que, depuis son entrée en politique et dans toutes les administrations qu’il a successivement servies (Carter, Reagan, Bush père et fils), Wolfowitz s’est toujours efforcé d’influencer la politique américaine dans un sens favorable à Israël. Dès 1978, à l’époque où il travaillait pour l’Agence pour le contrôle des armements et le désarmement, il a fait l’objet d’une enquête parlementaire : on le soupçonnait d’avoir transmis au gouvernement israélien, par l’intermédiaire de l’American Israel Public Affairs Committee (Aipac), le puissant lobby juif américain, un document « classifié » concernant des ventes d’armes américaines à des pays arabes. Curieusement, son ami Douglas J. Feith, qu’il contribua à faire nommer au Pentagone, a été contraint de démissionner, en janvier dernier, pour la même raison : Larry Franklin, l’un de ses proches collaborateurs, aurait lui aussi transmis au gouvernement d’Ariel Sharon, toujours par le biais de l’Aipac, des informations classifiées.
Ce soupçon de dual loyalty, de double fidélité aux États-Unis et à Israël, handicape le clan néoconservateur au sein de l’administration Bush. On raconte qu’avant les attentats du 11 septembre 2001, Rumsfeld, se sentant isolé, aurait songé à démissionner : « Le Likoud règne en maître, ici ! » aurait confié à des amis le chef du Pentagone. Il va de soi que la tragédie de New York et de Washington a conduit les uns et les autres à resserrer provisoirement les rangs, sans lever pour autant toutes les ambiguïtés.
Il est tout de même surprenant de constater que, depuis sa première apparition dans un gouvernement américain, il y a près de trente ans, Wolfowitz a toujours été, au Pentagone comme au département d’État, le numéro deux, trois ou quatre, jamais le numéro un. Ses compétences n’étant pas en cause, il n’est pas interdit de se demander pourquoi. En fait, c’est une constante de la vie politique américaine depuis l’époque du diabolique John Edgar Hoover, le chef du FBI pendant un demi-siècle (1924-1972) : les ultras du Parti républicain tolèrent l’ascension des juifs – on pourrait ajouter : des catholiques – dans l’appareil d’État, mais font tout pour les empêcher d’atteindre le sommet de la hiérarchie. Ce qui n’exclut pas des exceptions, les plus notables étant, dans un cas, Henry Kissinger et, dans l’autre, les frères Kennedy.
Quoi qu’il en soit, un abîme sépare les positions de Wolfowitz, cet ancien démocrate jadis très engagé dans la lutte pour les droits civiques des Noirs, qui, aujourd’hui encore, croit sincèrement en l’essor planétaire des droits de l’homme et de la démocratie – aussi irréalistes que soient les moyens mis en oeuvre pour les imposer -, des positions souvent racistes et fascisantes des Cheney, Rumsfeld, John Bolton et consorts.
Après la mise en place de l’administration Bush II, le départ du gouvernement, à deux mois d’intervalle, de Feith et de Wolfowitz, ne peut être interprété que comme une mise à l’écart en douceur des néoconservateurs, devenus un obstacle à l’infléchissement de la politique américaine que la nouvelle secrétaire d’État, Condoleezza Rice, souhaite promouvoir au Moyen-Orient – et ailleurs. Dans la délicate partie d’échecs à trois joueurs engagée au sein de l’administration, le « clan des bigots » (les ultrareligieux réunis autour du « couple » Bush-Rice) semble bien avoir pris un avantage décisif. Et prévisible, puisque les Born Again Christians forment désormais les gros bataillons de l’électorat républicain.
« Je suis un idéaliste pratique », jure Wolfowitz. Idéaliste, sûrement, mais pratique ? Ses capacités de gestionnaire – amplement démontrées à la tête d’une administration aussi tentaculaire que le Pentagone – ne sont pas discutables, mais toute la politique qu’il a menée quatre ans durant témoigne d’une inquiétante propension à soumettre la réalité à ses désirs : il n’a pas renoncé à changer le monde !…
La pensée de Wolfowitz, on l’a vu, doit beaucoup à l’enseignement de Leo Strauss et de ses disciples, le professeur Allan Bloom et l’expert en stratégie nucléaire Albert Wohlstetter, fondateur de la Rand Corporation, l’un des principaux think-tanks néoconservateurs. Né en Allemagne en 1899, Strauss fut, dans les années 1930, le collaborateur d’un personnage aujourd’hui tombé dans l’oubli : Carl Schmitt. Élève de Martin Heidegger et admirateur de Mussolini, celui-ci fut le plus éminent juriste du IIIe Reich. Ce qui ne l’empêcha pas d’aider Strauss à fuir les persécutions antijuives et à gagner les États-Unis.
Établi à Chicago, Strauss s’efforcera de développer la pensée de ses maîtres germaniques en la débarrassant de ses scories hitlériennes, mais en en conservant le coeur : le culte de la force, conçue comme moteur de l’Histoire, dont la notion de guerre préventive est directement inspirée. C’est lui – aidé de Wohlstetter – qui convaincra le jeune Wolfowitz de se lancer dans la politique. Tous ceux qui comptent aujourd’hui dans les milieux néoconservateurs ont d’ailleurs subi, de près ou de loin, l’influence de l’enseignement straussien : de Richard Perle, l’ancien patron du Defense Policy Board, à Lewis « Scooter » Libby, le chef de cabinet de Cheney, en passant par James Wolsey, l’ancien chef de la CIA, John Ashcroft, l’ancien ministre de la Justice de Bush, Clarence Thomas, le juge à la Cour suprême, et bien d’autres. Sans parler des auteurs de best-sellers mondiaux Samuel Huttington (Le Choc des civilisations) et Francis Fukuyama (La Fin de l’Histoire et le dernier homme).
En élève doué qu’il a toujours été, Wolfowitz s’efforcera de réciter la leçon bien apprise. Dès les années 1970, il est l’un des plus farouches opposants à la politique de détente avec l’Union soviétique. Par la suite, il échafaude une théorie de l’hégémonie planétaire de l’Amérique – et de sa filiale israélienne – qui, en 1992, au début de l’ère clintonienne, aboutit au choix d’une cible privilégiée : l’Irak de Saddam Hussein. En 1997, il est le principal inspirateur du Project for the New American Century, première expression publique de la doctrine néoconservatrice, qu’il cosigne avec tous les ténors de l’aile droite du Parti républicain.
Séduisante au premier abord, sa conception de l’offensive contre l’Irak en mars 2003 – une sorte de dialectique de la masse militaire et de la vitesse d’intervention – pêche par son côté schématique et abstrait. Depuis son départ du Pentagone, Paul a fini par admettre, quoique avec une certaine réticence et en s’efforçant de diluer sa responsabilité dans la chaîne de commandement américain (« Je n’étais qu’une voix parmi beaucoup d’autres »), une partie de ses erreurs. « Nous avons, déclare-t-il à la revue Politique internationale, largement sous-estimé, pour ne pas dire ignoré, les intentions du parti Baas. Nous avons fini par réaliser, mais beaucoup trop tard, que l’essentiel de la riposte du gouvernement irakien aurait lieu après la fin des hostilités conventionnelles, et que Saddam Hussein avait mis en place un réseau logistique, financier et humain considérable destiné à plonger le pays dans le chaos et l’insurrection. »
De même, on se demande comment, disposant de l’énorme masse des informations transmises par les services américains, Wolfowitz a pu se montrer aussi naïf et se laisser intoxiquer – c’est le cas de le dire, s’agissant des prétendues armes de destruction massive irakiennes ! – par un Ahmed Chalabi. En fait, il a sans doute été victime de sa fidélité en amitié. Car les deux hommes se connaissent depuis quelque quarante ans. Étudiant en mathématiques à l’université de Chicago – tous les chemins, décidément… -, ledit Chalabi se lia en effet à la « camarilla straussienne ». On raconte même que c’est le Pr Wohlstetter qui lui fit rencontrer Richard Perle. Devenu chef de l’opposition irakienne en exil, agent de la CIA et banquier indélicat à ses heures, il connaissait évidemment mieux que personne les obsessions de ses commanditaires et amis. Sa rouerie consista à leur communiquer les – faux – renseignements qui les conduiraient à faire ce que lui-même souhaitait passionnément qu’ils fissent : renverser Saddam pour l’installer à sa place. Après une brève disgrâce, Chalabi est aujourd’hui ministre du Pétrole dans le nouveau gouvernement irakien. Et Wolfowitz, déçu, trouve son comportement « puzzling » (inexplicable)…
Au fond, Wolfowitz est un sentimental. La preuve : sa carrière professionnelle et sa vie privée sont inextricablement mêlées. Clare Selgin, sa première femme, épousée en 1968, est une universitaire spécialiste de l’Indonésie. Elle parle couramment, entre autres idiomes, le malais et le javanais, a publié un livre de référence sur son pays d’élection et travaillé pour divers organismes gouvernementaux (dont l’Usaid). Elle collabore actuellement au Centre pour la réforme institutionnelle et le secteur informel (Iris, en anglais).
À ses côtés, Wolfowitz s’est lui aussi beaucoup intéressé à l’Asie du Sud-Est. Au sein des deux administrations Reagan, il fut successivement secrétaire d’État adjoint chargé de l’Asie et du Pacifique (1983-1986) et ambassadeur à Djakarta (1986-1989). Quoi qu’en pensent aujourd’hui certains opposants philippins et indonésiens, il semble bien avoir fait alors ce qu’il a pu pour y promouvoir, dans les strictes limites imposées par ses fonctions, la démocratie et les droits de l’homme. Une photo de la chute de Ferdinand Marcos, à Manille, en 1986, figurait en bonne place dans son bureau au Pentagone, et on raconte qu’il ne ménagea pas ses efforts pour convertir le sanglant autocrate Suharto aux vertus de la démocratie – ce qui témoigne d’une singulière propension à l’optimisme !
Pourtant, au-delà des résultats mitigés de l’action de Wolfowitz sur le terrain, le plus important reste peut-être son désir de s’immerger dans la « culture de l’autre ». Loin du rôle de proconsul arrogant et lointain qu’il aurait pu se contenter de jouer, il étudia la langue, multiplia les déplacements dans l’archipel et participa même, dit-on, à un concours de cuisine organisé par un magazine féminin de Djakarta, raflant au passage le troisième prix !
Car ce civil libertarian (libertaire civique), comme il aime à se définir, croit vraiment que la pauvreté, la tyrannie et l’oppression ne sont pas inéluctables. Et que le rôle historique des États-Unis est de contribuer à les faire reculer…
Ponctué par les tumultes que l’on sait, le tournant du siècle s’est traduit par un virage à 180 degrés dans la vie personnelle, jusque-là rectiligne, de Paul Wolfowitz. Il y aura d’abord les rumeurs, jamais vraiment confirmées, d’une liaison « inappropriée », comme aurait dit Bill Clinton, avec une employée de la School of Advanced International Studies (SAIS), à l’époque où le futur numéro deux du Pentagone enseignait à la Johns Hopkins University. Puis celles, plus sérieusement étayées, d’une relation durable avec une féministe arabe. Longtemps top secret, l’information a fini par filtrer, d’abord sur Internet, puis dans la presse écrite, sans qu’il soit aisé de démêler la part du calcul politicien dans ces indiscrétions : les amours du « libérateur » de l’Irak et d’une descendante de Bédouins, n’était-ce pas trop beau pour être vrai ?
Shaha Ali Riza – c’est le nom de la nouvelle Cléopâtre – est en effet de nationalité britannique mais d’origine libyenne, née à Tunis et élevée en Arabie saoudite. Ancienne reaganienne, elle appelle de ses voeux une modernisation à marche forcée du monde arabe, dans tous les domaines, mais en premier lieu celui de la condition des femmes. Après de brillantes études universitaires (London School of Economics, Oxford), Shaha Ali Riza est aujourd’hui, à 51 ans, haut fonctionnaire à… la Banque mondiale, où elle est plus spécialement chargée des relations extérieures du département Moyen-Orient et Afrique.
L’épouse délaissée – Paul s’est séparé de Clare en 2002 – aurait fort mal pris son infortune et, s’il faut en croire le tabloïd britannique The Daily Mail, aurait même écrit à Bush pour l’alerter sur les risques que la liaison de son mari faisait courir à « la sécurité nationale ».
Shaha est pour sa part divorcée de Bülent Ali Reza, un Chypriote turc qui, depuis 1994, travaille pour l’administration américaine : il dirige le « projet Turquie » au Center for Strategic and International Studies (CSIS). En clair, c’est l’un des principaux inspirateurs de la politique turque des États-Unis !
Reste à savoir si, à l’instar d’un Robert McNamara, l’ancien secrétaire à la Défense qui bombarda sauvagement les populations vietnamiennes avant de se révéler un grand président de la Banque mondiale (1968-1981), Wolfowitz peut aujourd’hui réussir dans sa nouvelle mission. L’annonce de sa nomination a suscité des mouvements divers. Avant même sa prise de fonctions, il a été accusé, en bloc, de ne pas être un spécialiste du développement ; d’avoir pour mission de favoriser les pays amis de l’Amérique lors de l’attribution des programmes (il lui faudrait pour cela déjouer la vigilance des 184 pays membres et d’une équipe de directeurs fort sourcilleux) ; et, plus sérieusement, de nuire par son épouvantable réputation à la crédibilité des futures opérations de la Banque. En fait, le véritable test de ses intentions pourrait être, dans quelques mois, sa décision d’attribuer – ou de refuser – des crédits de développement aux mollahs iraniens.
Dans l’immédiat, force est de reconnaître que Wolfowitz a brillamment réussi ses premiers pas à la tête de l’institution. Du 12 au 17 juin, le périple qui l’a successivement conduit au Nigeria, en Afrique du Sud, au Burkina et au Rwanda a été un franc succès, au moins en termes d’image (voir J.A.I. n° 2319). De même, le soutien qu’il a apporté à l’accord sur l’annulation de la dette « multilatérale » des pays les plus pauvres a été unanimement bien accueilli, même s’il serait imprudent de se bercer de trop d’illusions sur l’efficacité de la nouvelle politique qui, de Washington à Londres, se met peu à peu en place. Paul Wolfowitz, deuxième violon dans un orchestre dont les solistes seraient Condi Rice et Tony Blair ? Pourquoi pas ? On découvrira peut-être un jour qu’il a finalement eu raison de laisser tomber les mathématiques…

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