Périlleux audit des contrats miniers

Publié le 18 juin 2007 Lecture : 2 minutes.

Aucun doute, le gouvernement congolais dirigé, depuis le mois de février, par Antoine Gizenga est entré dans le vif du sujet. Annoncé depuis près d’un an mais retardé pour cause d’élections, l’audit d’une soixantaine de contrats miniers a été officiellement lancé le 11 juin. Tous ces contrats avaient été conclus au cours des dix dernières années entre un État en pleine déliquescence et des partenaires privés fascinés par l’eldorado congolais. La RDC possède notamment les premières réserves mondiales de cuivre et de cobalt, dans la province du Katanga (sud du pays).
Pour l’instant, les autorités se bornent à parler de « révision », non de « résiliation », de ces partenariats. Pourtant, une enquête parlementaire conduite, en 2005-2006, par le député Christophe Lutundula a évalué à 10 milliards de dollars le montant des pertes occasionnées par le pillage des ressources géologiques du pays depuis la chute du maréchal Mobutu, en mai 1997. Dans les années 1970, le secteur minier représentait près de 70 % du PIB congolais, contre à peine 10 % aujourd’hui.
L’examen attentif des contrats incriminés montre que d’énormes avantages fiscaux ont été consentis aux sociétés minières. « L’opération a été conduite de la pire des manières, commente un observateur. La cession de permis miniers au privé n’est pas condamnable en soi, mais ces permis ont été presque systématiquement sous-évalués, voire jamais payés, grâce à des complicités au sein de l’appareil d’État. »
Les plus grandes compagnies internationales sont installées en RDC. Un document de travail de la Banque mondiale regrettait récemment « le manque de transparence » qui a présidé à la constitution, en 2005, de plusieurs joint-ventures, notamment avec les sociétés Phelps Dodge (États-Unis) et Forrest (Belgique).
Une commission composée d’une trentaine d’experts sera chargée de mener à bien des audits. L’examen se fera « au cas par cas » et des propositions seront faites « en vue de corriger les déséquilibres constatés », précise Martin Kabwelulu, le ministre des Mines, qui exclut prudemment toute « révolution minière ». Sur la soixantaine de contrats concernés, trente et un ont été conclus avec diverses sociétés étrangères par la Générale des carrières et des mines (Gécamines), implantée dans le Katanga.
« J’ai fourni au ministère toutes les informations nécessaires, explique Paul Fortin, le directeur de la Gécamines. On verra quels sont les points qui posent problème, mais ces joint-ventures avaient tous été approuvés par les autorités. Au final, le résultat de ces révisions dépendra de la taille des mailles du filet, mais il y a des équilibres à maintenir »
De fait, si les autorités congolaises affichent leur volonté de remettre un peu d’ordre dans le secteur minier afin de donner quelques gages à la communauté internationale, elles ne peuvent se permettre de se fâcher avec des investisseurs qui sont sur le point de relancer une activité en pleine déconfiture. Dans les années 1970-1980, la Gécamines produisait annuellement 400 000 t de cuivre, contre 22 000 t en 2006. Grâce aux majors étrangères, elle peut raisonnablement espérer en produire 500 000 t d’ici à cinq ans.
« Ces partenaires n’hésiteront pas à saisir la justice si leurs contrats sont remis en cause », explique Fortin. On l’aura compris : le gouvernement congolais marche sur des ufs.

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