Le consensus selon « Angie »

Réservée, sérieuse et pragmatique, la chancelière Angela Merkel incarne à elle seule toutes les qualités de son pays.

Publié le 18 juin 2007 Lecture : 2 minutes.

Le magazine Time avait, au mois d’août 2006, sacré Angela Merkel « femme la plus puissante du monde » devant la secrétaire d’État américaine Condoleezza Rice. À l’occasion du G8, qu’elle a présidé à Heiligendamm du 6 au 8 juin, elle s’est imposée comme un chef d’orchestre incontesté. Cette reconnaissance va autant à la chancelière qu’au pays qui l’a élue, car Angela Merkel est une parfaite incarnation d’une Allemagne en train de réussir sa mue.

Comme l’Allemagne, « Angie » hésite à pratiquer la rupture avec le vieux modèle social « rhénan » fondé sur le consensus. Elle, qu’on donnait gagnante haut la main en 2005, a été obligée de former un gouvernement avec ses adversaires sociaux-démocrates du PSD, car son discours ultralibéral a effrayé le corps électoral.
Mais cette cohabitation forcée, la chancelière la vit moins comme un affrontement que comme un travail d’équipe. Les journaux ont beau brocarder « son parcours sans faute et sans décisions », elle poursuit imperturbablement son chemin. Elle allège la charge fiscale des entreprises – mesure de droite -, augmente le taux d’imposition pour les revenus les plus élevés – mesure de gauche -, renforce les compétences des Länder – mesure de bon sens. Les Allemands ont voulu un gouvernement de coalition : ils l’ont.
Comme l’Allemagne, Angela Merkel est sachlich, ce qui veut dire rationnelle, sérieuse, réservée et sans agressivité. Cette physicienne de 51 ans, née en Allemagne communiste d’un père pasteur et d’une mère enseignante, ne paie pas de mine avec sa coupe de cheveux « au bol » et ses yeux de chien battu.
Elle préserve sa vie privée et son second mari, Joachim Sauer, un professeur de chimie, qui se montre si discret que les journalistes l’ont surnommé « le fantôme de l’opéra », allusion à sa seule passion connue pour le festival de Bayreuth.

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Représentante d’une Allemagne économiquement puissante, Madame la Chancelière en profite seulement pour se faire entendre. Elle pose sur la table les problèmes avec franchise et gentillesse. Elle ne cache à personne qu’elle veut limiter à deux degrés le réchauffement climatique au xxie siècle ou qu’elle ne souhaite pas l’entrée en Europe de la Turquie. Mais elle n’impose pas ses vues, cherchant le dénominateur commun de ses partenaires et suggérant la solution à laquelle elle veut parvenir. Son art est d’orienter le débat sans donner l’impression de le manipuler.
Et ça marche avec Poutine comme avec Bush. Nicolas Sarkozy, si pressé, apprendra bientôt la maestria lente et modeste avec cette femme pragmatique qui croit « qu’il n’y a rien de pire que d’avoir décidé trop tôt pour constater que l’on aurait mieux fait de réfléchir davantage ». La « First Lady de l’Europe » est une vraie Allemande.

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