Voix du monde à Nouakchott

Succès populaire pour la deuxième édition du Festival des musiques nomades qui s’est déroulée du 4 au 8 avril dans la capitale mauritanienne.

Publié le 18 avril 2005 Lecture : 2 minutes.

Bamako a ses Rencontres photographiques, Dakar son Dak’art, Ouaga son Fespaco, Marrakech fait son cinéma. Et Nouakchott ? Le désert. Du moins jusqu’à la création du Festival des musiques nomades, en février 2004. La deuxième édition de la manifestation vient de se dérouler du 4 au 8 avril. Avec, en première partie de la soirée d’ouverture, la voix d’Ooleya Mint Amartichitt, diva mauritanienne aux caprices de star qui n’a cessé de reporter ses rendez-vous avec la presse. Et, en deuxième partie, du flamenco, incarné par une vibrante Andalouse – un pléonasme ! -, Mercedes Ruiz. La fougue passionnée de ses gestos de mujeres (« gestes de femmes ») a bouleversé le public, majoritairement maure ce premier soir.
Le lendemain, les Bratsch ont tenté, sans grand succès, d’emmener les spectateurs sur les routes tziganes. Leurs mélopées, qui expriment la lancinante nostalgie de contrées à jamais hors d’atteinte, n’ont pas trouvé un cadre favorable à Nouakchott, où elles n’ont pas exercé leur habituel pouvoir de séduction. Heureusement, le surlendemain, le stade fut gagné par la folle générosité de Sivan Perwer, chantre du peuple kurde. « C’est mon premier concert en Afrique. La prochaine fois, je reviendrai avec plus de percussionnistes », confiait le lendemain cet artiste plein d’attentions pour son public. Intense émotion, également, lorsque Daby Touré, un enfant du pays, est monté sur scène. Mais grosse déception lorsqu’il l’a quittée sans crier gare, la qualité du son n’étant pas à la hauteur de ses attentes…
Mais foin de ces lubies… et passons à la soirée de clôture. En première partie, Aicha Mint Chigualy, une griotte qui a appris à jouer de l’ardin (harpe maure) avec sa mère, elle-même initiée à l’instrument par la sienne. Aicha a-t-elle à son tour initié sa fille ? « Non, parce que son père appartient à une famille de marabouts et que les femmes de cette caste ne chantent pas. » En Mauritanie, il est difficile de transcender le système des castes, mais ailleurs ce n’est pas impossible. La preuve par le Sénégalais Baaba Maal : il n’est pas griot de naissance, mais il a su dépasser les tabous et chanter pour son bonheur mais aussi, ce vendredi 8 avril, pour celui de la foule qui se pressait dans le stade du Ksar.
Mais le Festival des musiques nomades ne s’est pas contenté d’investir ce stade, il a également effectué un premier pas en direction d’un public, notamment des quartiers miséreux, qui, spontanément, ne se serait peut-être pas déplacé pour assister à ses concerts. Ce qui représente un inestimable cadeau pour des populations déshéritées, exclues de la culture. Pour notre part, nous garderons un souvenir émerveillé des veillées musicales, sous la kheima (« tente ») dressée dans la cour de l’Institut français, et dont le signal de départ n’était donné que longtemps après le coup de minuit. Les sons harmonieux de l’ardin emplissent encore nos oreilles.

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