Un parti pour Sidi

Le président dispose désormais d’une formation politique sur laquelle il peut s’appuyer : le Pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD).

Publié le 18 février 2008 Lecture : 4 minutes.

Sa naissance était prévue en septembre dernier. Finalement, il aura fallu attendre quatre mois et quelques manuvres politiciennes avant que le très controversé parti de la majorité présidentielle voie le jour. Fin janvier, le ministère de l’Intérieur a donné sa réponse – évidemment positive – à la demande d’agrément déposée quinze jours plus tôt. Depuis, la machine politique dédiée au soutien de Sidi Ould Cheikh Abdallahi est en route. Elle compte un président, le ministre secrétaire général de la présidence, Yahya Ould Ahmed el-Waghf, et un conseil national, aujourd’hui fort de quelque 350 membres, qui devait se réunir pour la première fois le 15 février. Elle porte un nom : le Pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD), le terme de « pacte » ayant été préféré à celui de « parti » pour évoquer le « dynamisme », explique le président. Son premier congrès est prévu d’ici six à douze mois.

Longue gestation
Sidi Ould Cheikh Abdallahi a accédé à la tête de l’État sans s’appuyer sur un parti. Soutenu pendant la campagne présidentielle par les 39 députés « indépendants » de la Chambre basse du Parlement – des « sans domicile fixe politiques », selon l’expression d’un journaliste mauritanien -, il a été rejoint, entre les deux tours, par l’Alliance populaire progressiste (APP) de Messaoud Ould Boulkheir (nommé président de l’Assemblée nationale) et par le camp de Zeine Ould Zeidane (moyennant quoi ce dernier est devenu Premier ministre). Mais le chef de l’État ne peut compter sur un courant politique solide et identifié. Une lacune que le gouvernement a souvent payée au prix fort, notamment en août dernier, lors du vote de la loi de finances rectificative, adoptée à une très courte majorité. « Il fallait organiser la scène politique », explique aujourd’hui le président du PNDD. En clair, fixer les députés susceptibles de soutenir l’action du gouvernement dans le cadre d’un parti pour éviter le phénomène de nomadisme propre à la vie politique mauritanienne.
La gestation du PNDD, qui a débuté dès le lendemain de la présidentielle, a été longue. Fallait-il limiter le recrutement aux partisans du chef de l’État ou l’élargir pour attirer un plus grand nombre de personnalités ? Par crainte des ferments d’éclatement, c’est la première option qui a été retenue. Ce sont donc surtout les députés indépendants qui ont rejoint le PNDD. Mais quatre transfuges du Parti républicain pour la démocratie et le renouveau (PRDR) et un autre du Rassemblement des forces démocratiques (RFD) l’ont également rallié. Quant au Rassemblement pour la démocratie et l’unité (RDU), un vieux parti présidé par le charismatique Ahmed Ould Sidi Baba, figure historique du régime de Maaouiya Ould Taya, il est censé se fondre dans le PNDD. Au final, la nouvelle formation dispose d’une majorité de 48 députés (sur un total de 95) et devrait disposer du soutien d’autres petites formations, qui, sans pour autant se dissoudre, penchent en général vers le camp présidentiel.
Mais la mise sur pied de cet appareil politique ne fait pas pour autant l’unanimité. Sidi Ould Cheikh Abdallahi a beau rappeler qu’il est au-dessus des partis, et les ténors de la nouvelle formation répéter que ce sont les parlementaires, et non le président, qui sont à l’origine du projet, le PNDD reste le parti du chef de l’État. Il est d’ailleurs dirigé par le ministre secrétaire général de la présidence Dans une Mauritanie longtemps parasitée par le règne du Parti-État, la naissance du PNDD est perçue par beaucoup comme un retour en arrière : en septembre, le président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir, s’insurge : « Ce parti [] veut dire la mainmise du parti unique et la maîtrise par les plus forts des ressources de l’État et du pouvoir de décision. » En janvier, le chef de l’opposition et président du RFD, Ahmed Ould Daddah, affirme que la création du PNDD est « une provocation contre les citoyens, un coup bas contre la démocratie ».
Dans les rangs de la nouvelle formation, on se veut rassurant : « L’État se tiendra à égale distance de tous les partis, insiste Yahya Ould Ahmed el-Waghf. Il ne financera pas le PNDD et les postes dans les administrations ne seront pas liés à l’appartenance au parti. » Autant d’écueils qui, du temps de Ould Taya, confortaient la suprématie du Parti républicain démocratique et social (PRDS). « Ce parti, c’est une nécessité, tempère un observateur. Le président a besoin d’une machine qui lui soit dévouée pour faire face aux militaires, qui tirent encore les ficelles, et à l’opposition. On ne peut pas laisser tous ces députés indépendants prendre toutes les positions qu’ils veulent. » Et le même interlocuteur de souligner : « Autrefois, tout le monde voulait être du côté du président. Mais aujourd’hui, les mentalités ont évolué. Il n’est plus risqué d’appartenir à l’opposition. »

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