Mot compte triple à Dakar

Publié le 18 février 2008 Lecture : 2 minutes.

Vingt-sept titres internationaux depuis 2000, trois champions du monde sur quatre catégories en 2007 le Sénégal est incontestablement la patrie du Scrabble. À tel point que, du 18 au 25 juillet prochain, Dakar accueillera pour la première fois sur le continent les quelque 2 000 compétiteurs des 37e championnats du monde francophone. Et que quatorze mots wolofs ou puisés dans le lexique du français du Sénégal viennent de faire leur entrée dans l’Officiel du Scrabble (ODS), le dictionnaire de référence. On verra désormais apparaître sur les plateaux de jeu le « xalam » (guitare traditionnelle) et le « sabar » (tam-tam), le « thiof » (variété de mérou) et le « yet » (mollusque indispensable à la ?préparation du tiéboudienne, ?le riz au poisson), mais aussi les confréries « tidiane » ?et « mouride », les ethnies « laobé », « diola », ?« sérère »
Le phénomène n’est pas nouveau. Déjà, en 2004, l’ODS s’enrichissait du « mbalakh » (rythme caractéristique de la musique sénégalaise). Mais aussi de « primature » (siège du Premier ministre) et de « dibiterie » (débit de viande). Preuve que la francophonie enrichit la langue française. Un argument que met en avant Nadine Beraha-Maillol. Cette Française de 60 ans, passionnée de jeu et de voyages, organise du 10 février au 4 mai un Rallye des mots au Bénin, au Cameroun, au Burkina Faso, au Mali et au Sénégal.
Cette ancienne psychosociologue ne voyage pas légère. Elle emporte avec elle 15 m3 de matériel et distribuera 570 jeux, 10 ordinateurs portables, près de 3 000 dictionnaires et divers matériels pédagogiques. Un apport considérable lorsque l’on sait qu’il faut compter près de 40 euros pour une boîte de jeu familial et 70 euros pour une boîte de compétition avec plateau électronique.
Depuis son invention en 1931 par un architecte new-yorkais, Alfred Mosher Butts et, surtout, l’opération publicitaire relayée par le Club Med en France en 1965, le Scrabble est devenu l’un des jeux les plus populaires au monde avec 100 millions de boîtes vendues dans 121 pays. S’il souffre d’une image vieillotte en Europe, il attire un jeune public en Afrique subsaharienne. La fédération sénégalaise, extrêmement bien structurée, compte 2 600 licenciés pour une population de 12 millions d’habitants, dont à peine 40 % est alphabétisée.
« C’est le modèle à suivre, explique Nadine Beraha-Maillol. L’équipe de Scrabbleurs sénégalais est reconnue et soutenue par le gouvernement. Les joueurs ont leur tenue officielle. Avant chaque compétition, ils se retirent une semaine au calme pour se préparer comme une équipe de foot. » Le ministère de l’Éducation a d’ailleurs signé, en décembre 2007, un accord-cadre avec la Fédération sénégalaise de Scrabble, transformant le jeu en outil pédagogique d’apprentissage du français au sein des écoles et attribuera des bourses d’études aux meilleurs élèves Scrabbleurs qui se seront distingués lors de compétitions fédérales.
Avec un budget de 15 000 euros, le Rallye des mots, parrainé par la Fédération internationale de Scrabble francophone, dont le Sénégal est l’un des membres fondateurs depuis 1978 avec la Belgique, la France, le Québec et la Suisse, aidera à la formation, à l’organisation et à l’arbitrage de tournois. Il contribuera aussi à la structuration des fédérations nationales africaines. Un projet que Nadine Beraha-Maillol souhaiterait poursuivre en Afrique centrale et au Maghreb. En attendant, elle raconte chaque semaine son voyage sur son blog, à consulter sur le site de la Fédération internationale (http://www.fisf.net). Histoire de montrer que le Scrabble n’est pas qu’un jeu de mamie !

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