Docteur Schweitzer au chevet du « Monde »

L’ancien patron de Renault remplace Alain Minc à la tête du conseil de surveillance du quotidien. Sera-t-il l’homme providentiel tant attendu ?

Publié le 18 février 2008 Lecture : 3 minutes.

Dans la famille Schweitzer, demandez Louis, neveu du Prix Nobel de la paix, le célèbre médecin de Lambaréné, et fils de Pierre-Paul, qui dirigea le FMI de 1963 à 1973. Mais, davantage qu’à sa parentèle, c’est à un parcours personnel hors du commun que ce grand escogriffe né en 1942 doit d’avoir été élu le 11 février dernier, à l’unanimité, à la présidence du conseil de surveillance du célèbre « quotidien du soir », où il succède à Alain Minc.
De l’ENA à la direction du Trésor, du cabinet de Laurent Fabius – les mauvaises langues vous diront que c’est à Matignon, où il eut à connaître de l’affaire des écoutes du journaliste Edwy Plenel, que Louis Schweitzer a bénéficié de son premier apprentissage dans le domaine de la presse – à la direction générale de Renault – dont il préside toujours le conseil d’administration -, de son appartenance revendiquée à gauche au soutien affiché de Jacques Chirac, de son siège d’administrateur des plus grosses firmes internationales (L’Oréal, Veolia, EDF, BNP Paribas, Volvo, Philips, et j’en passe) à ses récentes fonctions de président plutôt actif (et courageux) de la Halde (la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité), il était difficile de trouver homme exhibant une plus belle brochette de compétences et de médailles. Si l’on y ajoute sa passion du théâtre – Schweitzer préside depuis plusieurs années le Festival d’Avignon -, dont on a vu qu’elle était largement partagée dans les assemblées générales et les bureaux de son futur journal, ce « profil » d’exception paraît tout à fait coller à la situation pour le moins complexe dont il vient désormais d’hériter.
En effet, si Louis Schweitzer trouve, aux côtés du nouveau « patron » Éric Fottorino, place nette sur un ring déserté par les combattants d’hier – Alain Minc a démissionné, comme promis, dans la foulée du départ de l’intransigeant Jean-Michel Dumay, qui laisse la Société des rédacteurs à sa consur Béatrice Gurrey, tandis qu’un nouveau DG, le gestionnaire David Guiraud, est venu, des Échos, occuper les bureaux vides du tandem Jeantet-Patino – et s’il semble qu’on ait sonné la fin du psychodrame, la crise du Monde n’en est pas résolue pour autant.

Casse-tête
Elle consiste, en deux mots, en un redoutable effet de ciseaux entre l’indépendance du journal et l’obligation de réduire son endettement ainsi qu’entre le maintien de la qualité du titre et le montant des économies nécessaires pour lui faire retrouver une exploitation équilibrée. Plus les actionnaires extérieurs seront sollicités pour dégonfler rapidement l’énorme dette de près de 100 millions d’euros qui obère les comptes du groupe, plus il sera difficile de les tenir à distance des enjeux rédactionnels. Ceci pour le casse-tête de la « recapitalisation » préparée par Alain Minc avec les Espagnols de Prisa et Arnaud Lagardère, sur laquelle on attend d’autres propositions de la part de Schweitzer, qui confirmerait ainsi son statut d’homme providentiel.
Dans l’immédiat, la nouvelle équipe est confrontée à l’urgence de redresser une exploitation lourdement déficitaire. De ce point de vue, Louis Schweitzer fait craindre à certains qu’il ne soit que trop, en l’occurrence, l’homme de la situation : n’est-ce pas lui qui, il y a une dizaine d’années, en décidant la fermeture de l’usine Renault de Vilvoorde, en Belgique, avait gaillardement assumé d’être mis au ban de l’Europe sociale ? Ce ne serait certes pas quelques dizaines de licenciements supplémentaires qui pourraient aujourd’hui lui faire peur

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