Bush, Olmert et la baignoire
« Finir le job » : expression anglo-saxonne en usage chez les tueurs à gages en fin de contrat et les chefs de l’exécutif dont le mandat (ou la crédibilité) arrive à expiration. Parfois, ces deux catégories d’individus pressés et expéditifs se rejoignent, ainsi que viennent de le démontrer, en cette mi-février, Ehoud Olmert et George W. Bush. Le premier est vraisemblablement à l’origine de l’assassinat à Damas du terroriste libanais Imad Moughniyeh, cible quasi mythique du Mossad depuis un quart de siècle (voir pp. 14-15) et dont le nom figurait en bonne place sur la liste des ennemis d’Israël à abattre – tout comme y figurent ceux d’Hassan Nasrallah et des leaders du Hamas Khaled Mechaal et Ismaïl Haniyeh, qualifiés il y a peu par un ministre israélien de « têtes du serpent ». Quant au second, il a apporté son soutien à la requête du Pentagone de faire juger les six présumés responsables des attentats du 11 septembre 2001 par un tribunal militaire dont le verdict est dicté à l’avance : la peine de mort.
Exécutions extrajudiciaires d’un côté, justice d’exception de l’autre : la similitude est troublante et logique entre deux alliés qui partagent tout ou presque dans leur guerre commune contre un ennemi commun. Mais si Israël peut triompher d’avoir mis une croix sur le visage du fondateur de la branche armée du Hezbollah, il n’est pas sûr que les États-Unis sortent indemnes d’un procès à hauts risques, au cours duquel au moins trois des inculpés raconteront comment les enquêteurs ont obtenu leurs aveux après les avoir soumis à des exercices répétés de « waterboarding » (simulacre de noyade), technique connue en d’autres lieux sous le nom de « supplice de la baignoire » et dont la Gestapo fut grande utilisatrice. Ce dernier rapprochement, qui ne manquera pas d’être fait, a d’ailleurs quelque chose de fâcheux pour l’administration Bush : n’a-t-elle pas donné pour consigne à ses diplomates de comparer le procès à venir des six d’Al-Qaïda à celui des dignitaires nazis de Nuremberg ?
Obsédé par son désir de « finir le job » avant de quitter le pouvoir, le président américain n’a cure de ce type de rappel. Et ce n’est pas la communauté échevelée des avocats d’Ayaan Hirshi Ali, menacée par une inacceptable fatwa (voir pp. 56-57), qui viendra le contredire. Pour ces spécialistes des droits de l’homme à géométrie variable, seuls comptent ceux qu’une interprétation dévoyée de l’islam a condamnés à mort. Les autres, ces musulmans contre lesquels « l’axe du bien » a prononcé sa sentence exécutoire, n’existent tout simplement pas.
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